Cela ne nous rajeunit pas. La RM 016 fut dévoilée par Richard Mille en 2007 et je me souviens très bien que j'avais été très séduit par cette pièce. Elle était la première montre rectangulaire de Richard Mille et malgré sa taille généreuse, j'avais été attiré par la fluidité de ses lignes amplifiée par la finesse du boîtier. La démarche esthétique était finalement similaire à celle du duo RM 05 et RM 010, mettant en scène un cadran ouvert, les chiffres caractéristiques périphériques et un guichet de date discrètement logé à 7 heures. Compte tenu de mon intérêt pour la RM 016, j'ai accueilli avec beaucoup de curiosité (et je dois l'avouer avec surprise) l'annonce d'une nouvelle déclinaison de la RM 016... 18 ans après la version initiale. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que la RM 16-02 fait preuve de beaucoup de maturité en offrant de véritables avancées par rapport au modèle d'origine. Tout le talent des équipes de Richard Mille a été de conserver l'esprit de cette montre rectangulaire tout en la faisant évoluer de façon significative.
Il faut souligner 3 changements majeurs. Le premier est une modification de la taille. Cette modification est subtile car la largeur et la longueur ne sont réduites que de quelques pour cent. Richard Mille annonce que le volume total de la montre est réduit de 10 pour cent. Je ne sais pas comment ils arrivent à ce résultat puisqu'en comparant les dimensions de la RM 016 d'origine (49,8mm x 38mm x 8,25mm) à celles de la RM 16-02 (45,6 5mm x 36mm x 7,45mm), j'arrive à un résultat différent (soit une réduction plus significative !) que ce soit en surface ou en volume. S'agissant d'une montre de forme, cette évolution est en tout cas perceptible et impactante. La RM 16-02 gagne ainsi en élégance et devient plus facile à porter.
L'autre changement est le design de la partie visible du mouvement côté cadran. Je pourrais évoquer le design propre du cadran mais non: le cadran est toujours ouvert et c'est bien le mouvement qui est mis en scène derrière les chiffres. Ces chiffres sont d'ailleurs reliés par une double ligne qui dessine une forme géométrique improbable et qui accentue le style très anguleux. Les chiffres et les index sont donc situés au premier plan et la montre, malgré sa finesse, offre un effet de profondeur très réussi. Le rendu visuel est spectaculaire et offre une double sensation un peu paradoxale. Cela ressemble à un joli bazar mais comme tout est imbriqué avec des lignes droites très prononcées, c'est en même temps très structuré. En tout cas, le résultat est là: le design de cette partie visible côté cadran est très contemporain, abouti et se marie idéalement avec la forme du boîtier. La lisibilité est même préservée puisque le contraste entre les aiguilles et le mouvement est suffisant. Et puis, comment ne pas évoquer une décision qui m'a on ne peut plus convaincu: le retrait du guichet de date. La RM 16-02 n'offre que l'affichage des heures et des minutes, elle va à l'essentiel et elle le fait très bien. Le retrait du guichet s'explique, au-delà de l'intérêt esthétique, par l'optimisation de l'épaisseur du boîtier. La hauteur du boîtier n'est plus que de 7,45mm contre 8,25mm pour celui de la RM 016. De toutes les façons, Richard Mille n'avait pas le choix. La réduction de la taille du boîtier devait s'accompagner d'une diminution de la hauteur pour conserver des proportions harmonieuses. A noter que l'étanchéité n'est que de 30 mètres, une conséquence peut-être de cette réduction de l'épaisseur.
Le dernier changement important est l'utilisation du calibre CRMA9. Comme évoqué précédemment, il est bien plus que le moteur de la montre. Son architecture, ses finitions, sa présentation constituent la base de l'approche esthétique de la RM 16-02. Ce mouvement de manufacture est d'ailleurs spécifique à ce modèle et c'est bien sa construction qui offre le dédale visuel composé d'une platine et de ponts en titane grade 5. Les solutions techniques mises en oeuvre sont cependant plus classiques chez Richard Mille et je retrouve ainsi le balancier à inertie variable et le barillet à rotation rapide. Le rotor est en platine afin d'améliorer l'efficacité du remontage. J'aime beaucoup le design de cette masse oscillante qui reste elle-même dans l'esprit de la montre avec une forme anguleuse et géométrique. Les ponts et la platine se mélangent, en fait je n'arrive plus à distinguer les uns des autres et c'est bien entendu voulu. Côté pile ou côté face, le calibre CRMA9 se distingue par son exécution soignée, cette dentelle mécanique et sa grande cohérence esthétique. Sa réserve de marche est d'une cinquantaine d'heures (un peu courte selon les standards actuels) pour une fréquence de 4hz. A noter l'absence de trotteuse mais un indicateur de marche reste visible puisque l'organe réglant (dont notamment le balancier) est perceptible côté cadran.
Deux versions de la RM 16-02 sont disponibles dans le cadre d'une série limitée de 75 pièces chacune: soit en titane soit en Quartz TPT Terracotta qui est celle présentée sur les photos. Cette dernière est évidemment la plus originale et la plus intéressante. Sa couleur est subtile car elle n'est pas agressive. Le rendu est singulier mais fonctionne très bien avec le boîtier rectangulaire et le dédale du cadran. La RM 16-02 se positionne sinon sans souci sur le poignet grâce à la boucle déployante qui est toujours d'une redoutable efficacité. Elle maintient fermement le boîtier sur le poignet ce qui est une bonne nouvelle. Malgré la réduction de la taille (ou du volume pour reprendre la terminologie de Richard Mille), la RM 16-02 reste une "grande" montre accentuée par sa forme rectangulaire. J'ai en tout cas pris beaucoup de plaisir à la porter. Le savoir-faire de Richard Mille se note dans son approche aboutie... et dans la capacité à définir une montre rectangulaire contemporaine, singulière et non dénuée de raffinement. Alors oui, le prix est élevé dans l'absolu pour une montre à deux aiguilles et sans complication (CHF 120.000 hors taxes pour la version en titane et CHF 140.000 hors taxes pour la version en Quartz TPT Terracota). Mais il est logique dans le contexte Richard Mille et surtout, après avoir observé de près cette RM 16-02, force est de constater qu'elle démontre tous les progrès effectués par la manufacture depuis la sortie de la RM 016. La proximité esthétique est certes là mais la RM 16-02, du fait des évolutions qu'elle intègre et de son exécution, se situe 3 coudées au-dessus de sa devancière qui était déjà une belle montre.
Les plus:
+ une cohérence esthétique poussée à l'extrême
+ les proportions optimisées
+ le confort au porter
+ le rendu visuel du boîtier Quartz TPT Terracota
Les moins:
- l'étanchéité de 30 mètres seulement
- une réserve de marche un peu courte (50 heures)
- le prix, élevé dans l'absolu mais qui n'empêchera pas les deux versions de se vendre sans problème