Les premiers pas sans fausse note d'ALTO et de son premier modèle ART 01

En participant au Tour Auto pendant la semaine qui a précédé le lancement de sa marque ALTO, Thibaud Guittard a fait bien plus que de se changer les idées avant d'aborder cet événement crucial. Il a d'une certaine façon légitimé sa démarche en rappelant son amour des belles mécaniques et notamment des supercars des années 70. Car lorsque je découvris il y a quelques jours la première montre ALTO, l'ART 01, je ne pus que constater cette inspiration. C'est une évidence de rappeler qu'il est extrêmement difficile aujourd'hui de lancer une marque. Difficile dans le sens de se distinguer de la meute car des lancements, il y en a quasiment tous les jours. Et ceux qui parviennent à survivre puis à se développer sont ceux qui ont pu apporter quelque chose de différent ou de nouveau dans le paysage horloger. Compte tenu de son parcours professionnel, notamment chez Audemars Piguet, Thibaud Guittard le sait pertinemment. C'est la raison pour laquelle il a abordé son projet avec beaucoup de réflexion et de maturité et je pense qu'il a les pris les choses par le bon bout. Les arguments qui me poussent à cette conclusion sont les suivants:

  • L'ART 01 possède une identité qui lui est propre grâce à la forme du boîtier et à la trotteuse sénestre (tournant dans le sens anti-horaire) qui surprend au premier abord. Ce sont les éléments que nous appréhendons en premier lieu.

  • Puis beaucoup de soin a été apporté aux détails esthétiques ce qui renforce la cohérence de l'ensemble. Le point qui m'a le plus plu est la forme quasi prismatique du verre qui semble prolonger les lignes géométriques du boîtier. Le résultat me fait penser à une montre "Facet" résolument contemporaine. Le travail esthétique sur le boîtier en titane est également accompli. Lorsqu'on observe la carrure, on est surpris par l'absence de cornes et par les approches anguleuses qui apportent de la fluidité en cassant la perception de l'épaisseur et qui favorisent l'intégration du bracelet en caoutchouc. Incontestablement, la touche de Barth Nussbaumer, qui a travaillé sur le projet, se ressent.
  • Le cadran au décor lamé propose des effets de volume et donne l'impression de retranscrire une sorte de propagation hexagonale. Mais le principal intérêt de ce cadran est de proposer de très beaux reflets de lumière accentués par la forme du verre. C'est incontestablement le complément idéal du verre. Les aiguilles sont plutôt simples (mais pas inintéressantes) et ont pour principal but de préserver la lisibilité en toute circonstance.

  • L'ART 01 est confortable à porter grâce à un bracelet caoutchouc qui épouse le poignet. L'absence de corne permet de réduire la taille perçue ce qui est un bon point. Je n'ai pas les dimensions officielles du boîtier mais s'agissant d'un boîtier de forme, le taille ressentie demeure supérieure à une montre ronde équivalente. Grâce à l'intégration du bracelet, même un poignet modeste sera en mesure de porter la pièce sans souci. Le poids total est de 56g et cette légèreté, combinée au bon maintien, explique la sensation agréable lorsque la montre est portée. 
  • L'ambition de Thibaud Guittard est de s'adresser avant tout à un public amateur d'art et pas forcément à des purs férus d'horlogerie. Il a ainsi beaucoup travaillé l'environnement et le contexte de la marque afin de créer une sorte d'imaginaire autour de l'ART 01. La fluidité du design et le comportement de la trotteuse sont le fruit d'une réflexion sur le mouvement, en tant que composante artistique, et sur le temps qui passe. Il a mis les moyens pour séduire ce public grâce notamment à l'implication de Mathieu César qui a créé un film dédié au mouvement et qui plonge les spectateurs dans l'univers d'ALTO. J'imagine que les prochaines démarches de communication se poursuivront dans la même lignée.

  • L'excellente nouvelle est que, malgré cette stratégie, la substance horlogère n'a pas été oubliée. L'ART 01 est animée par un mouvement exclusif développé par le Cercle des Horlogers et qui a été dessiné par Barth Nussbaumer. Sa forme correspond à celle du boîtier ce qui est un véritable atout en matière de crédibilité. De plus, il présente une architecture étonnante comme si les éléments mobiles avaient été écartés pour occuper de façon optimale l'espace et pour donner l'opportunité de créer des ponts géométriques qui font écho au boîtier et au cadran. Ainsi, le barillet se situe au-dessus du micro-rotor tandis que le balancier se trouve à l'opposé de la couronne. Le résultat est très convaincant du point de vue visuel du fait non seulement de cette architecture originale mais de la qualité de la finition qui est restée, fort heureusement, sobre et soignée. La cohérence est préservée grâce à un traitement PVD apporté sur la platine, les ponts et les modules. En termes de performances, le calibre possède une réserve de marche de 48 heures (un peu courte selon les standards actuels) pour une fréquence de 4hz. 

J'ai donc apprécié la démarche de Thibaud Guittard car elle m'a semblé être bien pensée et surtout j'ai le sentiment que l'ART 01 traduit bien les idées qu'il a voulu mettre en oeuvre. A titre personnel, j'aurais sûrement préféré que le cadran s'ouvre pour profiter de l'architecture du mouvement mais la montre aurait perdu de sa singularité ainsi que le jeu de lumière avec le verre. C'est aussi ce qui me fait dire que Thibaud Guittard a raison de s'adresser à une clientèle plus "lifestyle" qui sera plus en adéquation avec l'univers de sa marque.

L'ART 01 est disponible dans le cadre d'une série limitée de 25 pièces à un prix de 19.100 euros HT.