Les trois chronographes Flyback que Furlan Marri a présenté début décembre constituent une étape importante dans sa trajectoire. Ils démontrent l'ambition de monter en gamme en proposant un contenu horloger supérieur à celui des premières montres qui ont forgé le succès de la jeune marque fondée par Andrea Furlan et Hamad Al Marri. De fait, ils s'inscrivent dans une démarche similaire à celle qui avait conduit à dévoiler une pièce unique comprenant un quantième perpétuel séculaire développé par Dominique Renaud et Julien Tixier en prévision de l'édition 2023 d'Only Watch. Certes, les chronographes Flyback n'ont pas le même niveau de contenu horloger que cette pièce unique. Mais l'écart par rapport aux chronographes Mecaquartz est manifeste. De toutes les façons, le constat est simple: ces trois montres qui ont été créées en collaboration avec Auro Montanari et Revolution sont les premiers chronographes 100% mécaniques de Furlan Marri.
Cela fait plusieurs jours que j'ai l'occasion de porter la version Taupe Flyback et je dois avouer que je suis particulièrement convaincu et séduit par cette pièce portant la référence 3177-A. Elle reste fidèle à l'esprit de la marque qui consiste à faire revivre des designs de chronographes historiques des belles maisons genevoises. Je retrouve donc avec plaisir cette patte particulière et le souci du détail qui caractérisent les montres Furlan Marri, y compris celles vendues à 555 francs suisses. Le principal attrait du chronographe Taupe Flyback est son cadran irréprochable et bien plus complexe qu'il ne semble être au premier regard. Tout d'abord, il est équilibré grâce à l'emplacement optimal du compteur des minutes (à droite) et du secteur de la trotteuse permanente (à gauche). Ensuite il est véritablement tri-dimensionnel du fait de l'utilisation d'index appliqués, de la zone centrale surélevée et de la graduation pulsométrique (sur une base de 30 pulsations) en retrait. Les effets de relief se ressentent nettement et sont amplifiés par la forme du verre. L'échelle pulsométrique joue plusieurs rôles. D'abord elle rajoute une fonction et renforce la dimension néo-rétro de la montre. Ensuite, elle rééquilibre visuellement le cadran en contribuant à la sensation que les sous-cadrans sont bien placés. Les aiguilles sont joliment exécutées, elles sont polies et courbées afin de suivre la plongée du cadran vers la zone périphérique.
La teinte dominante du cadran est, vous l'avez deviné, la couleur taupe. C'est la raison pour laquelle j'ai la sensation que le cadran oscille en permanence entre le gris et le brun. Les effets de lumière sont réussis car les sous-cadrans et l'échelle périphérique apparaissent de façon plus intense que la zone centrale du cadran. Dans l'ensemble la montre est lisible sans aucun souci. Dans certaines conditions de lumière plus hasardeuses, le contraste entre les aiguilles et le cadran s'estompe et la lecture devient plus délicate. Ce n'est toutefois pas la faute du verre car sa forme glassbox permet d'apporter un maximum de luminosité sur le cadran. Ce verre est lui aussi complexe. Au-delà de sa forme, il comporte 5 couches de revêtement anti-reflet et une couche supérieure atténuant les traces de doigt.
Le diamètre du boîtier en acier est de 38mm ce qui est une taille tout à fait raisonnable et logique compte tenu de l'inspiration esthétique. La présence de la Taupe Flyback sur le poignet est cependant supérieure à ce que le pur énoncé de cette taille pourrait supposer. Cette sensation est due à la forme des cornes qui prolonge avec fluidité le boîtier (la distance de corne à corne est de 46mm) mais également à l'épaisseur de la montre. L'épaisseur totale (verre compris) est de 13,2mm si bien que le ratio diamètre / épaisseur est plutôt faible. La Taupe Flyback n'est pas massive, loin de là mais ses proportions lui donnent un style un peu ramassé. En tout cas, le boîtier a du caractère et il ne laisse pas indifférent. J'ai beaucoup aimé la forme des poussoirs en olive et la couronne qui est très agréable à manipuler. Le parfait alignement des poussoirs par rapport à la couronne ne laisse aucun doute: le mouvement qui équipe la Taupe Flyback n'a pas une construction modulaire et la fonction chronographe est bel et bien intégrée.
Ce calibre peut être observé à travers le fond transparent. Il s'agit d'un mouvement Sellita portant la référence AMT5100. Il est équipé d'une roue à colonne, d'un mécanisme de retour en vol et sa fréquence est de 4hz pour une réserve de marche d'une soixantaine d'heures.
J'apprécie ce mouvement pour plusieurs raisons. Pour son architecture tout d'abord. Le mécanisme dédié à la fonction chronographe est visible et la roue à colonnes est mise en valeur. Le mouvement est relativement épais (7mm) ce qui crée un effet de relief entre le mécanisme de chronographe et le mécanisme de base. Le niveau du balancier se trouve par exemple très éloigné du niveau de la roue à colonnes. La forme du pont du mécanisme chronographe est agréable même si j'aurais préféré qu'il soit un peu plus ouvert. Mais un effort a été réalisé par rapport à la version standard du mouvement. Il suffit d'observer le contour pour apprécier les angles qui ont été créés autour de la vis située à côté du balancier. C'est un point important à souligner: les chronographes Flyback de Furlan Marri se distinguent par une finition exclusive qui renforce significativement la qualité perçue. En sus de la forme du pont qui a été redessinée, la finition en or rose 18 carats souligne les très jolies côtes de Genève et plusieurs gravures ont été rajoutées. Le résultat d'ensemble est très appréciable et valorise la pièce en lui conférant un intérêt horloger supérieur. Ensuite, j'apprécie ce mouvement car il est très facile à vivre au quotidien. C'est une excellente surprise pour moi: la sensation au remontage est parfaite, ni trop douce, ni trop dure, je prends beaucoup de plaisir à le remonter tous les jours. Les poussoirs sont aussi très bien pensés et seul le poussoir inférieur en fonction retour en vol est plus dur à activer ce qui est logique. En tout cas, j'ai été séduit par ce mouvement, par ses performances, par sa présentation et par sa finition exclusive. Il est dans ce contexte un moteur idéal pour la Taupe Flyback et ses deux autres cousines. Sa référence comporte les trois lettres AMT qui confirment que son origine provient d'une entité spécifique de Sellita, AMT, dédiée à des mouvements plus haut de gamme ou plus spécifiques. En tout cas, Sellita et AMT ont bien travaillé compte tenu du résultat plus que probant.
Je considère ainsi la Taupe Flyback comme une très belle réussite d'ensemble et elle symbolise efficacement la volonté de monter en gamme de Furlan Marri. La Taupe Flyback est une montre cohérente et qui derrière un design volontairement classique possède quelques surprises comme la finition du mouvement ou la forme des poussoirs. Le plus important est qu'elle s'avère adaptée à un usage quotidien grâce à son remontage plaisant et à son cadran joliment exécuté. Au moment où j'écris ces lignes, la Taupe Flyback, qui était commercialisée à un prix de 2.750 francs suisses hors taxes, est sold out. Cependant, il reste quelques exemplaires de la version à cadran bleu ainsi que de la version à cadran saumon, cette dernière étant exclusivement commercialisée via le site de Revolution. Chaque version a été produite en série limitée de 300 exemplaires.
Les plus:
+ un cadran très bien dessiné et exécuté
+ la forme des poussoirs
+ les performances et la finition du mouvement
+ le plaisir lors du remontage
Les moins:
- des proportions qui donnent un style un peu trapu
- le contraste entre les aiguilles et le cadran s'estompe dans certaines conditions de lumière