Quelques mots sur la Rolex Cellini Dual Time et plus largement sur la collection Cellini

J'ai eu l'occasion de revoir la Rolex Cellini Dual Time il y a quelques semaines et je me faisais la réflexion que c'était une très jolie montre mettant en scène l'affichage du second fuseau horaire. Elle m'avait alors donné envie de refaire le point sur la collection Cellini en visitant le site de Rolex et quelle ne fut pas ma surprise en constatant que cette référence avait été retirée du catalogue.

C'est dommage que cette montre soit partie sur la pointe des pieds depuis plusieurs mois déjà car je lui trouve beaucoup d'intérêt. J'avais déjà écrit longuement  dessus il y a quelques années et finalement les sentiments que j'avais exprimés en 2014 lors de sa présentation n'ont guère changé. Je la considère comme une pièce convaincante grâce à plusieurs atouts:

  • sa taille équilibrée (39mm)
  • la présentation de son cadran avec une combinaison d'éléments appliqués et d'un guillochage en rayons de soleil
  • l'organisation  du cadran qui privilégie l'efficacité et qui intègre harmonieusement l'affichage jour/nuit du second fuseau (je pense même que c'est un modèle du genre)
  • les performances de son mouvement issu  de la famille 31xx (certes d'une génération antérieure à celle des mouvements qui sont déployés aujourd'hui) mais qui se distinguait déjà par son spiral Parachrom et sa certification Chronomètre.


Qu'est-ce qui peut expliquer un tel retrait? Un désintérêt de la clientèle qui se focalise presque exclusivement sur les Oyster classiques ou professionnelles? Les tendances du marché qui tiennent compte de l'évolution de nos modes de vie et qui favorisent les montres plus décontractées? Une préparation à une refonte de la collection Cellini en intégrant la nouvelle génération de mouvements? Ou une anticipation d'un retrait d'autres références de la collection? Quoi qu'il en soit, j'ai la conviction que les montres Cellini (si je mets de côté la Moonphase qui connaît un intérêt grandissant) n'ont pas eu la reconnaissance qu'elles méritent.

A quoi cela est dû? Au-delà de leur dimension patrimoniale qui constitue aujourd'hui un vecteur important des ventes Rolex, les Oyster sont considérées comme les références de leurs catégories respectives. Ce n'est pas forcément le cas des Cellini malgré leurs qualités incontestables. Sur cette thématique de la montre élégante en or, habillée (et forcément moins polyvalente), Rolex doit faire face à une compétition qui a du répondant et de la crédibilité. Et surtout je pense que dans ce cas précis, Rolex manque peut-être de l'état d'esprit adapté à la réalisation d'une montre habillée que l'on pourrait qualifier d'idéale.


Je constate que dans la conception des Cellini, Rolex conserve ses principes prioritaires tels que l'efficacité, la fiabilité et la dimension pratique. Mine de rien, toutes les montres de la collection Cellini partagent en commun une étanchéité raisonnable de 50 mètres et un fond plein qui a été privilégié pour préserver la finesse de boîtier. Or, pour qu'une montre habillée soit totalement séduisante, il faut lui injecter une dimension futile voire irrationnelle. Par exemple,  un fond transparent qui permet d'apprécier un mouvement joliment décoré. Ou une approche plus élégante de la boucle. Ou un traitement anti-reflet double-face du verre saphir. Ou un détail exubérant ou décalé qui apporte une touche d'originalité supplémentaire mettant en valeur une technique décorative. Mais voilà, Rolex se concentre en priorité dans les finitions techniques et dans les approches qui ont de la pertinence dans l'expérience du propriétaire de la montre. 

Je pense cependant que si un jour Rolex souhaite mener une nouvelle réflexion sur une collection de montres habillées, la manufacture ne devra pas oublier que la montre Cellini qui rencontre de nos jours le plus grand succès est la Moonphase. Or cette dernière possède, avec son affichage qui offre une vision permanente sur la lune en météorite, une originalité et un détail poétique qui font sûrement défaut aux autres modèles. Il y a assurément matière à penser.  Maintenant, j'imagine que les priorités d'aujourd'hui pour Rolex sont ailleurs. Le marché réclament des montres polyvalentes, tant du point de vue esthétique que pratique et sur ce point, difficile de faire mieux que les Oyster. Rolex doit avant toute autre considération préserver son leadership en travaillant sur les collections qui établissent sa renommée et son prestige.