Ikepod: Seapod

Préambule: les montres photographiées étaient des prototypes et comportaient des imperfections

Ce qui me fait plaisir de constater depuis le renaissance d'Ikepod sous l'impulsion de Christian-Louis Col, c'est que son état d'esprit n'a pas changé. Elle reste et elle demeure une marque de design et donc de designer. Cependant, il va falloir dorénavant mettre ce dernier mot au pluriel puisque Christian-Louis Col n'hésite pas à faire appel à des talents divers pour réinterpréter dans un contexte contemporain le style caractéristique d'Ikepod. Ainsi, Emmanuel Gueit travailla sur les cadrans des Chronopod et Duopod. Alexandre Peraldi oeuvra sur la Megapod. Et la toute dernière création de la marque n'est pas en reste puisqu'elle est l'oeuvre de Fabrice Gonet. 

La Seapod avait tout d'un projet casse-figure. D'abord parce que la première montre d'Ikepod était la Sea Slug et qu'elle posait les jalons de la démarche horlogère de Marc Newson (après sa Pod initiale). Ensuite parce que la création d'une montre de plongée est un exercice contraint car devant s'effectuer dans le respect de nombreux principes afin d'obtenir les performances et la sécurité requises. Enfin parce que le nouveau positionnement tarifaire dans lequel Christian-Louis Col a logé la marque, imposait une maîtrise des coûts afin de conserver des prix de vente raisonnables et abordables. Or une montre de plongée n'est pas forcément le projet le moins onéreux. Et pourtant, la magie opère et tous ces paramètres délicats n'ont pas empêché d'aboutir à un résultat convaincant et séduisant.


La Seapod me plaît en tout premier lieu parce que c'est une montre qui surprend et qui se permet même de renouveler le genre. Fabrice Gonet est parvenu, avec beaucoup de talent, à remettre en scène des détails présents sur la Sea Slug, à créer un nouveau contexte autour et à définir une pièce qui possède sa propre personnalité tout en restant résolument imprégnée du style d'Ikepod. Il suffit pour s'en convaincre d'effacer le logo et le nom du modèle du cadran: pas de doute, malgré ces retraits, la Seapod est bel et bien une montre Ikepod. La Sea Slug m'évoquait une sorte de soucoupe trapézoïdale. La Seapod joue une partition différente, bien plus galbée. Elle peut être considérée comme le point de rencontre entre la Sea Slug et l'Hemipode. Vue de profil, elle ressemble à un galet rebondi dont la hauteur maximum est de 17mm. Mais si on a plus d'imagination et un état d'esprit mieux connecté à l'univers d'Ikepod, on discerne alors une espèce de soucoupe volante tout droit sortie d'un film de science-fiction de série b des années 70. Et franchement cela donne immédiatement plus de charme!


La montre est épaisse, c'est une réalité. Mais ces proportions demeurent équilibrées car le diamètre est de 46mm. De fait, le rapport diamètre sur épaisseur reste raisonnable. Le boîtier évite aussi l'effet "boîte de thon" car la Seapod offre un style tout en rondeurs et en courbes. Elle a même un côté sensuel qui nous pousse à la caresser quand on la met au poignet afin de laisser nos doigts effleurer ses lignes. Il ne faut pas être effrayé non plus par le diamètre. N'oublions pas que les montres Ikepod n'ont pas de cornes visibles, le bracelet se logeant sous la partie la plus large du boîtier. Un diamètre de 46mm chez Ikepod peut être considéré comme un équivalent d'un diamètre 42 ou 43mm avec un boîtier traditionnel. Le gabarit peut toutefois sembler correspondre à celui d'une montre aux performances en matière d'étanchéité supérieures aux 200 mètres de la Seapod. Mais n'oublions pas qu'Ikepod est une marque de design avant tout et que l'obtention de la rondeur voulue nécessitait de telles proportions.


Le boîtier en acier est incontestablement un des principaux atouts de la Seapod. Au-delà de son style, c'est l'intégration technique et esthétique de la lunette tournante qui m'a bluffé. La lunette semble totalement indissociable du reste du boîtier... et pourtant elle tourne! Et elle ne tourne pas comme n'importe quelle autre lunette. Elle tourne sans cran perceptible mais se positionne à l'endroit voulu grâce à un dosage parfait de la dureté. Maintenant, il faut avouer que nous ne sommes pas dans le contexte de la montre Instrument la plus exigeante du marché. La graduation de la lunette est réduite à sa plus simple expression (ce qui est un vrai avantage du point de vue esthétique) mais heureusement le rehaut interne apporte son soutien pour les graduations des minutes.

La version Jacques:


Le seul bémol que j'exprimerais à l'encontre du boîtier se situe au niveau de la couronne. Elle est semblable à celle de la Sea Slug mais la couronne de cette dernière devenait quasiment invisible (et protégée) une fois vissée. Elle reste proéminente et exposée sur la Seapod.

L'autre élément qui m'a beaucoup plu est le cadran. C'est lui qui offre les références les plus évidentes à la Sea Slug car nous retrouvons les index et les aiguilles de la montre d'origine. Ils ne sont pas tout à fait identiques car Fabrice Gonet a soigné les détails et la cohérence de l'ensemble. Les index sont bicolores avec une zone centrale non luminescente et j'ai l'impression que les proportions des aiguilles ont légèrement changé avec une aiguille des heures plus courte pour éviter le risque de confusion de lecture. En tout cas, quelle que soit la version, j'ai apprécié l'harmonie des couleurs entre les index et les aiguilles avec une préférence pour la version Zale et ses détails orange.

La version François:


La finition du cadran est tout à fait correcte surtout en considérant le segment de prix. Le rehaut interne qui plonge de la lunette vers le cadran donne un joli effet de volume et justifie l'épaisseur du boîtier. L'ouverture du cadran est mesurée compte tenu de la largeur significative de la lunette et de la présence du rehaut. Cette largeur de lunette accentue joliment le galbe de la montre et réduit la taille perçue. L'excellente nouvelle (pour moi) est l'absence d'un affichage de la date qui rend la montre plus pure, plus équilibrée et surtout plus symétrique ce qui était important compte tenu de la forme du boîtier (ce qui me fait un peu regretter la couronne proéminente).

Finalement, le point qui m'a le plus étonné concernant la Seapod fut le choix de rendre visible le mouvement. Je peux comprendre la décision du point de vue commercial, le grand public acheteur de montres automatiques préfère pouvoir apprécier la dimension mécanique de la montre. Cependant, dans le contexte d'une montre de plongée, cela ne me semblait pas indispensable. De plus le mouvement Miyota 9039 qui anime la Seapod n'est pas d'une beauté inoubliable même si sa présentation est satisfaisante. Compte tenu du fait qu'il est petit pour le boîtier, j'aurais personnellement opté pour un fond plein. En tout cas, ce mouvement fera l'affaire sans souci compte tenu de sa robustesse et sa fiabilité. Ses performances sont dans la norme avec une réserve de marche autour de 42 heures pour une fréquence de 4hz. Sa précision pourra être plus aléatoire en revanche.

La version Zale:


Trois versions de la Seapod sont disponibles. La Zale et la Jacques possèdent des touches de couleurs (orange ou bleu) tandis que la François adopte un style monochrome soutenu par un boîtier en pvd noir. Mes préférées sont sans aucun doute les deux premières avec un coup de coeur pour la Zale et sa couleur orange très "Ikepod". Dans chaque cas, le bracelet en caoutchouc maintient fermement la Seapod sur le poignet ce qui est indispensable compte tenu du gabarit du boîtier. Comme exposé précédemment, la taille perçue est moindre que la taille réelle et on est séduit par la faculté de la Seapod à s'adapter à des poignets divers et variés. 

Les versions Zale et Jacques sont commercialisées au prix de 1.350 euros TTC tandis que la version François est vendue au prix de 1.450 euros TTC. J'ai trouvé ces prix raisonnables compte tenu de la qualité générale de l'exécution, la cohérence de l'approche et surtout la réussite esthétique. Fabrice Gonet a vraiment fait un excellent travail qui se ressent dans le plaisir de porter cette montre de caractère et stylée. Finalement, c'est plutôt réjouissant de constater qu'il n'est pas nécessaire de dépenser des sommes considérables pour profiter d'un design qui sort des sentiers battus.

Les plus:

+ une réussite esthétique qui combine cohérence et originalité

+ l'intégration de la lunette tournante dans le boîtier

+ un cadran abouti porté par la réinterprétation des index de la Sea Slug...et l'absence de date!

+ le prix somme toute raisonnable pour une montre de plongée originale

Les moins:

- la couronne proéminente

- un fond plein m'aurait semblé plus approprié