Une des plus belles montres de Lange & Söhne est la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar qui fut dévoilée lors du SIHH 2012. Cependant, malgré son intérêt technique et l'originalité de sa présentation, je n'ai jamais vraiment compris cette montre... ou plutôt je n'ai pas perçu l'intérêt de la présence d'un tourbillon dans ce contexte et je ne fus pas le seul. L'organisation du cadran, la parfaite intégration de la complication du quantième perpétuel dans le design rigoureux et géométrique de la Lange One me paraissaient suffire en tant que telles et ce d'autant plus que le tourbillon n'était même pas visible côté cadran. Bien entendu, il y avait deux raisons à cette démarche de la part de Lange & Söhne. La première était de développer un mouvement automatique à tourbillon. La deuxième, plus factuelle était de proposer une montre à un prix beaucoup plus élevé. Quoi qu'il en soit, je regrettais la présence de ce tourbillon et c'est pour cela que je me réjouis de la sortie neuf ans plus tard (il a fallu être patient!) de la Lange One Perpetual Calendar.
De prime abord, cette nouveauté n'est pas vraiment surprenante du point de vue technique et esthétique. Le calibre L021.3 qui l'anime est une évolution du calibre L021.1 de la Lange One Daymatic grâce à l'adjonction du mécanisme de quantième perpétuel. Et l'architecture du cadran est la même que celle de la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar. La manufacture aurait eu tort de s'en priver, c'est la grande force de la montre.
En effet, les montres à quantième perpétuel ont souvent une organisation de cadran stricte qui cumulent de nombreux affichages et qui rendent la lecture de l'information la plus importante, le quantième, très délicate. Car il faut rappeler le principe du quantième perpétuel: il s'agit tout simplement d'obtenir l'affichage exact du quantième au fil du déroulement des semaines et des mois sans avoir à effectuer des réglages. L'affichage des mois et des années servent avant tout à régler initialement le quantième plus qu'à donner une information au propriétaire de la montre. Moser l'avait bien compris avec sa montre à quantième perpétuel qui rendait presque invisible les affichages additionnels et qui se concentrait sur les quantièmes. La Lange One Perpetual Calendar propose à ce niveau un excellent compromis et peut-être l'affichage le plus pertinent de sa catégorie. Il combine la dimension pratique (les quantièmes sont extrêmement lisibles grâce à la grande date à double guichet), l'originalité grâce à la répartition inhabituelle des informations et une certaine complexité favorisant la qualité perçue.
Lange One automatique oblige, le sous-cadran dédié à l'affichage du temps est situé à droite ce qui est la position naturelle pour ceux qui portent la montre à gauche. Par rapport à une Lange One manuelle, nous sommes dans une sorte d'effet miroir inversé où l'affichage de la réserve de marche est remplacé par l'affichage des jours de la semaine. Les mois sont affichés par le biais d'un anneau périphérique et un index à 6 heures. Ce même index intègre l'affichage du rang des années pour mettre en valeur l'année bissextile. Les phases de lune sont insérées dans le secteur de la trotteuse. L'ensemble est lisible et surtout très agréable du point de vue esthétique tout en conservant les principes géométriques de la construction du cadran de la Lange One. La différence la plus notable par rapport à la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar est la disparition de l'indication tourbillon dans le sous-cadran horaire... un détail à l'avantage de la montre la plus simple. Mais ce n'est pas tout! Lange & Söhne a emprunté à la Lange One Moonphase deux caractéristiques qui sont loin d'être négligeables. Tout d'abord l'affichage des phases de lune intègre un indicateur jour & nuit qui est pratique lors du réglage de la montre et qui décore aussi joliment le cadran au gré des heures qui passent. Ensuite, le sous-cadran horaire devient plus sophistiqué avec une partie centrale surélevée et une finition circulaire de la zone des index. Un souci du détail qui renforce la qualité perçue et donne du caractère à la Lange One Perpetual Calendar.
La Lange One Perpetual Calendar est disponible en deux boîtiers, l'un en or gris avec un cadran en or rose dans le contexte d'une série limitée de 150 pièces, l'autre en or rose avec un cadran ardoise sans limitation. La taille du boîtier est similaire à celle de la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar avec un diamètre de 41,9mm. Seule l'épaisseur varie de façon imperceptible avec une hauteur de boîtier de 12,1mm au lieu de 12,2mm pour la montre à tourbillon.
La version qui a ma préférence est celle en or gris. Le contraste entre le cadran en or rose et le boîtier est superbe et il se dégage de l'ensemble une atmosphère chaleureuse, raffinée et plus audacieuse que les cadrans silver habituels de Lange & Söhne. L'autre version est séduisante également mais plus traditionnelle dans son approche. Je regrette cependant que la version en or gris soit limitée car une montre à quantième perpétuel en or gris est une sorte de base de collection et j'ai du mal à comprendre cette décision du point de vue de la construction du catalogue.
Le mouvement qui anime la Lange One Perpetual Calendar est le calibre L021.3. Comme Lange & Söhne fait très bien les choses, son architecture est finalement différente de celle du calibre L021.1. Ce n'est pas non plus une sorte de mouvement de la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar qui aurait été amputé de son tourbillon. Je pensais retrouver la même vue que l'arrière de la Lange One Daymatic et ce n'est pas le cas. Certes, l'esprit est similaire et notamment au niveau de la masse oscillante avec ces bras évidées et la section périphérique en platine qui améliore l'efficacité au remontage. Mais le calibre L021.3 offre une orientation du pont du balancier différente et surtout je trouve que les ponts sont plus ouverts. Cela est dû à un mécanisme de remontage automatique et au train de rouages qui ont été revus ainsi que l'intégration de l'affichage jour & nuit qui au bout du compte ont un impact technique certain. La vue de l'ensemble est d'après moi plus aérée et agréable que celle du mouvement de la Lange One Daymatic.
En revanche les standards de finition sont similaires avec la même rigueur dans l'exécution et une décoration très typée. C'est l'approche traditionnelle de Lange & Söhne qui s'exprime ici avec un style qui fait la part belle aux chatons en or et aux vis bleuies. Les mouvements automatiques "compliqués" à rotor central de Lange & Söhne sont plutôt baroques et ne laissent pas indifférents. Je trouve que le rendu visuel est cohérent avec l'atmosphère qui se dégage côté cadran. En tout cas, ce mouvement est très efficace du point de vue pratique grâce au réglage simple et au saut instantané à minuit. Le changement de mois est un vrai régal lorsque le saut de quantième s'accompagne de la rotation de l'anneau périphérique. La fréquence du mouvement est de 3hz pour une réserve de marche de 50 heures qui est un peu courte selon les standards d'aujourd'hui, surtout avec une montre à quantième perpétuel.
Quoi qu'il en soit, je considère que la Lange One Perpetual Calendar comme une très belle réussite de la part de la manufacture saxonne. Lange & Söhne est parvenue à proposer la complication du quantième perpétuel dans un contexte plus simple sans que le résultat n'apparaisse comme une déclinaison dégradée de la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar. J'ai envie de dire que c'est presque l'inverse! La présence de l'affichage jour & nuit et le léger relifting du sous-cadran horaire apportent une nouvelle preuve de l'approche soignée de Lange & Söhne tout comme l'architecture spécifique du mouvement L021.3. Mon seul regret finalement est de constater que la version en or gris est proposée dans le cadre d'une série limitée ce qui est dommage.
La version en or gris est vendue à un prix de 109.900 euros tandis que celle en or rose est disponible à un prix de 99.000 euros. C'est évidemment bien plus abordable que le prix de la Lange One Tourbillon Perpetual Calendar (321.800 euros en or rose et on a du mal à trouver la justification des 220.000 euros d'écart!) même si dans l'absolu cela reste élevé pour une montre automatique à quantième perpétuel sans complication additionnelle. Mais la qualité de l'exécution, l'originalité de la présentation de la complication et le soin apporté aux détails et aux finitions justifient ces prix. Et de toutes les façons, la Lange One Perpetual Calendar offre un rapport qualité/prix, si ce critère a du sens dans un tel segment tarifaire, nettement supérieur à celui de sa devancière à tourbillon.
Les plus:
+ l'originalité de l'affichage
+ des quantièmes lisibles
+ la qualité des finitions
+ l'intégration de l'affichage jour & nuit
+ la beauté du cadran en or rose de la version en or gris
Les moins:
- une réserve de marche un peu courte
- la version en or gris est limitée ce qui est dommage