GENUS Dragon

La montre GENUS Dragon est la dernière création de la jeune marque fondée par Catherine Henry et Sébastien Billières. Elle tire profit de la spécificité de l'affichage du temps principalement basé sur des éléments mobiles qui suivent un parcours en 8 pour mettre en scène un superbe dragon en or. Point de rencontre entre démarche artistique et innovation horlogère, la GENUS Dragon est une des nouveautés marquantes de ce début d'année.

Lors de la présentation de la GNS 1, j'avais présenté en détail les spécificités de l'affichage et du mécanisme propres à GENUS. Les multiples prouesses techniques mises en oeuvre permettaient d'obtenir plusieurs types d'animation sur le cadran et de réinterpréter la lecture du temps. S'il fallait résumer l'affichage de GENUS, je n'emploierais qu'un seul mot: celui de "mouvement". Mouvement parce que le calibre de la montre et le cadran ne font qu'un. Mouvement parce que de nombreux éléments mobiles bougent en effectuant des révolutions, en tournant sur eux-mêmes ou en changeant d'orbite. Mais attention: chez GENUS, rien n'est brusque ni saccadé. Les animations se déroulent de façon lente, continue et sans rupture.
 


Le potentiel artistique offert par la GNS 1 est donc réel car sur ce premier modèle, le déplacement du "Genus" (la fameuse chenille centrale composée de 12 éléments et dont la tête indique les dizaines de minutes) fascine. Même si, évidemment, ce Genus suit un parcours bien établi, le fait qu'il puisse passer d'une orbite à une autre donne le sentiment qu'il évolue avec une certaine liberté, étant capable de s'enrouler, de se déployer en fonction du temps qui passe. Il devient véritablement polymorphe. Ce parcours, étant situé sur la zone centrale verticale de la montre, capte l'essentiel de l'attention et met au second plan une autre prouesse: la faculté qu'ont les chiffres des heures périphériques de pivoter sur eux-mêmes tout en effectuant une révolution autour du cadran. On retrouve avec ces chiffres un comportement similaire à ceux des satellites d'Urwerk. Les unités des minutes sont affichées d'une façon que je qualifierais de plus traditionnelle avec un disque tournant devant un repère.
 


La montre GENUS Dragon conserve intégralement les principes de l'affichage de la GNS 1. En revanche, le Genus se transforme et devient un magnifique dragon sculpté en or. Ce changement a un impact significatif sur la montre puisque c'est tout son rendu visuel qui est modifié. En fait, en passant d'une chenille dont les éléments s'intègrent parfaitement dans un environnement très mécanique et technique à un animal, même légendaire, l'équipe GENUS modifie toute l'atmosphère qui se dégage de la pièce.

Le résultat est en tout cas magnifique. Le dragon se déploie, se referme, s'étire, change de position sans à-coups et de façon permanente. Ainsi, en fonction du déroulement du temps et de la trajectoire qui est empruntée, nous pouvons observer les multiples détails de ce dragon sous tous les angles. Il mérite en tout cas d'être scruté car sa réalisation est digne du contexte d'excellence technique dans lequel il évolue. Il comporte un élément libre de moins que le Genus d'origine. Mais dans le cas précis du dragon, nous parlons d'une véritable sculpture en or articulée. L'observation de la tête est révélatrice du niveau de précision que l'artiste en charge de cette réalisation a dû mettre en oeuvre. La finesse des longues moustaches, les reliefs, les écailles, les différentes textures, la complexité des formes, chaque composante du dragon est exécutée de façon majestueuse. C'est la raison pour laquelle il évoque plus un automate à l'extrême mobilité qu'une traditionnelle gravure horlogère. En fait, la GENUS Dragon accentue une sensation présente avec la GNS 1: la plongée dans un univers tri-dimensionnel.
 

 
Toute la difficulté a été de trouver le bon gabarit de l'animal pour l'intégrer efficacement dans l'affichage. Sa taille doit être suffisamment imposante pour obtenir le rendu visuel voulu tout en demeurant contenue pour que l'animation se déroule sans problème tout le long de la trajectoire. Car n'oublions pas que le parcours n'est pas rectiligne. Le dragon doit dessiner un 8 en une heure et ses différents éléments doivent pivoter de façon indépendante pour que le chemin soit suivi avec fluidité.

Que ce soit à vitesse naturelle ou en vitesse accélérée obtenue en manipulant la couronne, le déplacement du dragon répond à cette ambition. Même lorsqu'il se retrouve en forme de cercle, aucun élément perturbateur n'interrompt la poursuite de l'animation.
 


Obtenir une telle performance n'est pas chose aisée et au-delà du travail de l'artiste qui a façonné l'animal, Sébastien Billères a dû aussi travailler sur le mouvement. En tout cas, la GENUS Dragon apporte la preuve des performances du calibre 160W-1.2. Comme avec la GNS 1, ce mouvement est fondé sur une structure modulaire. La base qui va animer le module d'affichage conserve les mêmes caractéristiques avec son barillet unique, sa fréquence de 2,5hz pour une réserve de marche de 50 heures. La puissance délivrée par cette base est importante afin d'apporter l'énergie suffisante aux multiples animations de l'affichage. La finition de ce calibre de base, observée côté ponts, est excellente, inspirée par la pure tradition horlogère suisse. J'apprécie particulièrement le pont de balancier traversant et le contraste entre ce pont et le pont d'échappement. J'aime cette architecture de calibre, à base fréquence et à grand balancier car au-delà de la puissance qui est délivrée, elle assure aussi une très bonne stabilité de comportement. C'est un point important compte tenu des spécificités de l'affichage.
 


L'intégration du dragon ne s'est pas faite sans contrainte. Contrairement aux éléments habituels du Genus, le dragon possède des segments qui ne sont pas identiques et ayant des tailles et des poids différents. Le dragon a de fait une plus grande concentration de poids au niveau de la tête qu'au niveau de la queue. Le calibre 160W-1.2 a été adapté à ce nouveau contexte afin que l'animation se déroule avec la même précision tout le long de la réserve de marche et que les performances chronométriques ne soient pas altérées.

Tout ceci explique pourquoi le développement d'une telle montre a nécessité beaucoup plus de temps que prévu: la seule modélisation de l'animal a nécessité plus d'un an de travail.
 


L'environnement dans lequel il évolue a lui-aussi été modifié par rapport à la GNS 1. La finition des pièces du mouvement côté cadran a été réalisée pour donner une base plus lumineuse. Les pièces bleuies qui existent sur la GNS 1 sont cette fois ci polies. L'ensemble apparaît comme plus homogène et plus propice à mettre en valeur le dragon.

Le verre a également été modifié. Compte tenu de la taille du dragon, la forme et la hauteur du verre ont été revus pour apporter toute la lumière nécessaire à la fois par le dessus mais également par les côtés. Le cadran (ou plutôt le devant de la montre) est baigné de lumière, rendant ainsi l'observation des détails beaucoup plus aisée. Ce jeu de lumière est fondamental dans la réussite esthétique de la GENUS Dragon. La contrepartie est que la montre gagne significativement en embonpoint car son épaisseur passe de 13,1mm à 18,8mm. Heureusement, comme la carrure du boîtier en or gris reste la même, cette augmentation de l'épaisseur est moins perceptible que la pure interprétation des chiffres pourrait le laisser supposer. Elle est cependant bien réelle et c'est un paramètre à prendre en compte. 
 
Cliquez sur le lien ci-après pour voir l'animation du dragon que j'ai postée sur mon compte Instagram:
 
Quoi qu'il en soit, cette épaisseur est vite acceptée une fois la montre mise au poignet ou plutôt: une fois que nous laissons le temps se dérouler et que le dragon suit paisiblement sa trajectoire. Car incontestablement lorsque j'ai porté la GENUS Dragon, j'ai très vite oublié tout ce qu'il y avait autour: les autres affichages, le mécanisme apparent, l'heure indiquée par le montre... Le dragon est plutôt bienveillant, peu agressif et sans aucune connotation particulière ce qui est très agréable et pertinent avec la vitesse de déplacement. Le premier réflexe serait de penser qu'il s'agit d'une montre réalisée à l'attention de la clientèle chinoise. Mais elle pourrait aussi séduire une clientèle (certes fortunée) de n'importe quel continent. Le dragon est un animal légendaire dans de nombreux pays et l'interprétation de GENUS est à ce titre compatible avec des goûts et des cultures divers et variés.
 


Malgré son aspect original et la touche d'exubérance apportée par le dragon en or, la GENUS Dragon reste une montre tout à fait portable au quotidien. Son diamètre de 43mm (identique à celui de la GNS 1) s'adapte bien au poignet compte tenu de la forme des cornes et le remontage manuel est très agréable. La lecture de l'heure nécessite une période d'accoutumance mais la position des chiffres périphériques apportent déjà une indication. L'observation du dragon peut alors se résumer à un simple plaisir esthétique tout en oubliant toute considération utilitaire... même si la tête de l'animal répond à cet enjeu (je distingue bien mieux la tête de la queue qu'avec le Genus classique!). Reste la problématique de l'épaisseur qui empêche la montre de passer sous la manche de la chemise... mais aurions-nous vraiment envie de cacher le dragon ? La GENUS Dragon a été faite pour capter la lumière et profiter des lents mouvements de l'animal. Alors, pourquoi s'en priver surtout après avoir fait l'effort de débourser 150.000 francs suisses pour acquérir une telle pièce ?
 

 
En conclusion, je considère la GENUS Dragon comme une montre magnifique car la dimension artistique est parfaitement intégrée dans l'affichage du temps. L'ensemble peut apparaître comme excessif mais c'est ce qui fait son intérêt. Montre cohérente et parfaitement exécutée, la GENUS Dragon indique clairement la voie à suivre pour la jeune marque car elle confirme tout le potentiel technique et artistique du mouvement de base et du module d'affichage.
 
Les plus:
+ la parfaite intégration de la dimension artistique
+ l'exécution remarquable du dragon
+ le confort au porter malgré le gabarit
+ un mouvement agréable à utiliser au quotidien

Les moins:
- l'épaisseur de la montre