Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis la présentation en 2015 de la Quai des Bergues, première montre qui marquait le véritable lancement de la nouvelle marque Czapek. L'horloger polonais Franciszek Czapek fut connu pour avoir fondé avec son compatriote Antoni Patek la marque Patek & Czapek & Cie en 1839. Leur collaboration ne dura que quelques années et Franciszek Czapek créa en 1845 sa propre société. La disparition de Czapek en 1869 et l'interruption de l'activité de la société ont fait que son patronyme n'a pas de nos jours la notoriété de celui de Patek, première composante du nom de la marque la plus prestigieuse au monde. Et pourtant Czapek connut le succès lorsqu'il développa sa propre activité comme en témoignèrent l'ouverture de boutiques à Genève, Paris et Varsovie. Il s'agissait donc d'un très beau nom à faire revivre dans le paysage horloger, un nom qui a laissé des traces tant du point de vue horloger que de celui du rayonnement commercial.
J'ai suivi la marque Czapek depuis le lancement de la Quai des Bergues. Le travail accompli plus récemment par Xavier de Roquemaurel et ses collègues a permis de solidifier et structurer l'entreprise autour de 3 axes: celui de chaîne d'approvisionnement, celui de la distribution et celui de l'offre produits.
Les montres de la collection Quai des Bergues, qui se caractérisent par leur indicateur de réserve de marche à 4h30 et leur petite seconde à 7h30 sont animées par un mouvement exclusif développé avec Chronode. C'est également le même partenaire qui a été impliqué dans le mouvement de la collection Place Vendôme à tourbillon. En revanche, la collection Faubourg de Cracovie utilise une exécution sur mesure du mouvement chronographe intégré et à haute fréquence (5hz) de Vaucher. Enfin, la collection Sport Chic, Antarctique, marque les premiers pas de Czapek vers l'utilisation d'un calibre propre puisque le mouvement SXH5.01 à micro-rotor a été conçu en interne à partir d'une feuille blanche. En diversifiant ses sources d'approvisionnement en calibres, la marque oeuvre ainsi à maîtriser les risques.
Le réseau de distribution s'est développé et même si le nombre de points de vente reste limité, le maillage est complet avec une présence en Amérique du Nord, en Europe et en Asie grâce à l'implication de partenaires détaillants connus... sans oublier l'ouverture de la boutique Czapek à Genève.
Enfin, le catalogue s'est élargi en nombre de références et plus important, en styles. Si les collections Quai des Bergues et Place Vendôme définissent une offre classique, les collections Faubourg de Cracovie et Antartique explorent d'autres dimensions, plus décontractées, plus polyvalentes pour proposer des montres qui correspondent peut-être mieux aujourd'hui à l'aspiration d'une clientèle en constante évolution.
La Czapek Faubourg de Cracovie California Dreamin' est de ce point de vue très intéressante. En effet, je me souviens très bien des premiers modèles de la collection Faubourg de Cracovie, marqués par une approche qui restait encore très prudente d'une certaine façon. Certes, ces premiers cadrans étaient audacieux dans leur présentation du fait de leurs impressionnants guillochages et faisaient preuve d'un rendu dynamique. Mais Czapek restait dans un contexte classique alors que la montre et son mouvement demandaient peut-être quelque chose de plus "contemporain" et de moins élaboré. Je pense sincèrement que la version California Dreamin' est la plus réussie du lot. Elle dépoussière le style et je trouve que le cadran est ici totalement cohérent avec le boîtier et le mouvement.
La finition subtilement grenée du cadran noir est superbe et discrète. Elle apporte une touche de sophistication tout en restant discrète. La présence de l'échelle tachymétrique équilibre l'organisation du cadran et les sous-cadrans sont harmonieusement répartis. Compte tenu de cette échelle, les deux compteurs du chronographe ont été réduits mais je trouve le résultat plus satisfaisant ainsi. La combinaison de chiffres blancs, romains et arabes, typique des cadrans "California" (d'où le nom de la pièce) ressort nettement. Même si certains chiffres sont coupés, ils donnent beaucoup de caractère à la montre. J'apprécie également la forme des aiguilles, très réussie, l'intégration discrète de la date (qui disparaît presque dans le cadran) ainsi que la trotteuse du chronographe rouge.
Le boîtier en acier a un diamètre de 41,5mm. Sa taille est ici idéale compte tenu de l'organisation du cadran. La force de ce boîtier est l'intégration esthétique parfaite des poussoirs. Rien ne dépasse, ils semblent définir une sorte de protège-couronne. La couronne est joliment dessinée et elle donne du caractère au boîtier. Malgré leur intégration, les poussoirs se manipulent sans souci et de façon très agréable.
Le fond transparent permet d'apprécier le mouvement SXH3, en provenance de Vaucher par le biais d'une exécution exclusive pour Czapek. Les performances de ce mouvement de nouvelle génération sont excellentes: il offre une réserve de marche de 65 heures, une roue à colonnes, un embrayage vertical et un marteau linéaire. Un soin particulièrement poussé a donc été apporté sur le processus d'enclenchement. Mais l'excellente nouvelle est la fréquence de ce mouvement: 5hz. Il peut ainsi afficher des 1/10s de secondes (je rassure sur le fait que la graduation est cohérente avec cette fréquence) et même s'il y a de nos jours plusieurs calibres chronographes à haute fréquence, ils ne sont pas légion.
La présentation du mouvement est selon moi réussie. La masse oscillante dorée se distingue nettement du reste du calibre, fini avec une décoration très actuelle et des ponts de couleur anthracite. L'ouverture de la platine offre un style aéré. Les éléments mobiles tels que la roue à colonnes ou le balancier sont clairement visibles. L'ensemble est soigné et l'approche contemporaine se ressent dans les détails comme le pont du balancier. Incontestablement, il s'agit d'un très beau mouvement dont le diamètre propre de 30mm fait qu'il n'apparaît pas trop perdu dans le boîtier.
La Czapek Faubourg de Cracovie California Dreamin' est une montre très agréable à porter et à utiliser. Son côté polyvalent est confirmé par une étanchéité correcte de 50m et la mise à disposition d'un bracelet caoutchouc noir en sus du bracelet croco. Le cadran noir et l'échelle périphérique font diminuer la taille perçue et il se dégage de l'ensemble un sentiment d'équilibre. Grâce au contraste entre le blanc et le noir et la touche rouge, le chronographe propose une atmosphère très "racing" qui lui convient bien et qui me semble appropriée aux performances du mouvement.
La Czapek Faubourg de Cracovie California Dreamin' est vendue à un prix de CHF 28.000 hors taxes qui peut sembler élevé pour un chronographe en acier mais il émane d'une marque indépendante qui produit de petites séries et dans ce cas précis le nombre d'exemplaires n'est que de 18. Si on m'avait présenté cette pièce il y a quelques années, je n'aurais jamais deviné qu'il s'agissait d'une montre Czapek. Mais finalement c'est tout son intérêt: grâce à ce chronographe, la marque s'ouvre de nouveaux horizons et évite de s'enfermer dans un style ce qui aurait pu être problématique par la suite. Ce chronographe ainsi que la collection Antarctique, symbolisent une nouvelle étape dans le développement de Czapek. Et c'est toujours réjouissant de voir une jeune marque évoluer et explorer de nouvelles pistes. Cela montre qu'elle a des idées et de l'ambition.
Les plus:
+ les performances du mouvement
+ la présentation du cadran
+ l'intégration des poussoirs
+ les deux bracelets disponibles
Les moins:
- un prix élevé pour un chronographe en acier (mais de petite série)