Louis Erard est incontestablement une des marques qui bougent le plus ces derniers mois. Sous l'impulsion de Manuel Emch, elle fait preuve d'une ambition et d'une créativité renouvelées comme l'a prouvé la présentation de l'Excellence Régulateur réalisé avec Alain Silberstein. Cette montre a d'ailleurs eu un très bel impact pour Louis Erard. Elle a remis sous les feux des projecteurs cette maison fondée en 1929 et dépoussiéré son image. Louis Erard est effectivement une marque connue dans l'industrie horlogère suisse, réputée pour ses montres classiques soignées, proposées avec un bon rapport qualité-prix et pour sa spécialité: le régulateur. Cependant, jusqu'à sa reprise en mains, elle souffrait peut-être d'un manque de visibilité et de dynamisme. C'est d'ailleurs le principal objectif assigné à Manuel Emch. Il ne s'agit pas de juste créer quelques montres sympathiques qui attirent l'oeil mais bien de définir une feuille de route sur plusieurs années permettant à Louis Erard de se développer de tirer profit de ses atouts et de pérenniser sa situation. Car des atouts, il y en a. Il y a bien entendu le savoir-faire de la maison et son réseau de fournisseurs. Et il y a aussi le segment de prix dans lequel elle évolue qui rend la collection abordable surtout auprès d'une clientèle de marchés matures comme en Europe de l'Ouest. En effet, l'essentiel de la collection est commercialisée dans des prix compris entre 1.500 et 3.000 francs suisses. Pourtant, proposer un prix raisonnable ne suffit pas. Les clients espèrent une qualité irréprochable et des éléments esthétiques distinctifs: le segment est pour le moins encombré et extrêmement concurrentiel avec des acteurs qui peuvent avoir une puissance financière supérieure. Ainsi, Manuel Emch doit inscrire la sortie des nouvelles montres dans une perspective de construction de collection et de renforcement d'image.
L'Excellence Petite Seconde:
Dans ce contexte, la présentation du Triptyque Excellence répond parfaitement à cet enjeu. A travers ces trois nouveautés dévoilées conjointement, Louis Erard souhaite redéfinir son offre en matière de montres classiques. L'exercice est stratégiquement important et délicat. La montre classique, c'est la base d'une collection. Ce n'est pas forcément la montre la plus vendue mais elle assoit l'image de la marque et surtout elle démontre sa capacité de création. Pourquoi? Tout simplement parce que la montre classique répond à des codes, qu'elle offre finalement assez peu de degrés de liberté et qu'il faut faire preuve de talent pour trouver des facteurs distinctifs.
L'Excellence Régulateur:
Les trois montres du triptyque Excellence sont une démonstration réussie de cette capacité de création. En effet Louis Erard est parvenu à définir une cohérence esthétique entre les trois modèles malgré leurs complications différentes (petite seconde à six heures, régulateur et chronographe monopoussoir) et à proposer un style reconnaissable. Ce que je trouve intéressant dans ce triptyque, c'est la volonté de la maison de proposer quelque chose de nouveau, pas forcément d'une incroyable originalité mais au moins qui n'est pas fortement inspiré par un modèle du passé. Les 3 montres offrent ainsi:
- des cadrans opalin argenté mat avec une zone satinée circulaire (sauf pour le régulateur du fait de l'organisation de son cadran), des sous-cadrans avec une zone diamantée, des décalques anthracites et des index argentés brillants,
- de surprenantes aiguilles bleuies dont la forme rappelle les sapins du petit village du Noirmont où la marque est née,
- des boîtiers en acier arrondis inspirés par les montres de poche et des glaces saphir qui les dépassent légèrement,
- des bracelets de cuir de veau nubuck chocolat avec des coutures ton sur ton
- et des mouvements automatiques Sellita décorés avec soin et sobriété comprenant une masse oscillante ajourée avec le symbole Louis Erard.
L'Excellence Chrono Monopoussoir:
La montre que je préfère parmi les 3 est la plus simple, l'Excellence Petite Seconde. Son diamètre est de 42mm ce qui est un peu grand pour une montre simple. L'épaisseur est plutôt importante (12,25mm) mais elle ne se ressent pas compte tenu du diamètre. Le rendu du cadran est très équilibré grâce au grand secteur de la trotteuse. De plus, la taille met en valeur la forme des aiguilles. Le mouvement est le Sellita SW261-1 ayant une réserve de marche de 38 heures pour une fréquence de 4hz. J'ai particulièrement aimé les beaux reflets argentés du cadran qui s'expriment efficacement dans ce contexte plus simple. De plus la police des chiffres est élégante et contemporaine. Son prix est de 1.500 francs suisses.
Les finitions des mouvements sont similaires entre les 3 modèles (ici le régulateur). Mais c'est le Chrono Monopoussoir qui offre l'effet de profondeur le plus spectaculaire.
L'Excellence Régulateur démontre une nouvelle fois le savoir-faire de Louis Erard pour ce type de montre. Le rendu très épuré et argenté fonctionne bien là aussi et les aiguilles "sapin" apportent leur originalité. Le boîtier est le même que celui de l'Excellence Petite Seconde. Le mouvement est le Sellita SW266-1 aux performances similaires à celles du SW261-1. Le résultat est en tout cas esthétiquement probant même si je préfère l'Excellence Petite Seconde pour son contraste entre effets satinés et diamantés. Son prix est de 2.500 francs suisses.
Les reflets argentés du cadran:
L'Excellence Chrono Monopoussoir est la montre la plus ambitieuse du point de vue technique. Son mouvement est le calibre SW500MPCa avec une réserve de marche de 48 heures pour une fréquence de 4hz. Cette montre est intéressante dans son interprétation de la complication. Elle tire profit elle aussi du style épuré qui offre une bonne lisibilité des informations. Le rendu est presque simple et seul le poussoir intégré dans la couronne permet de deviner la complication. Le prix est très bien positionné compte tenu du contenu horloger (3.500 francs suisses). Le bémol est l'épaisseur du boîtier de 15,70mm pour un diamètre de 43mm.
En tout cas, j'ai apprécié cette proposition complète de Louis Erard. L'atmosphère qui se dégage est à la fois contemporaine et raffinée. Les montres n'ont aucun détail superflu et se concentrent sur l'essentiel. C'est le fruit du travail entrepris avec le designer Nicolas Barth Nussbaumer et les autres partenaires de la marque. Les finitions sont irréprochables pour les prix et j'ai pris beaucoup de plaisir à profiter des reflets argentés des cadrans. Les aiguilles constituent l'atout "charme" de ces montres et leur donnent caractère et identité. Quant aux mouvements Sellita, ils offrent un cadre rassurant compte tenu de leur large diffusion et de leur fiabilité. Quoi qu'il en soit, ce Triptyque Excellence complète efficacement la collection de la marque et apporte la preuve que son développement se poursuit selon la feuille de route établie par Manuel Emch.
Les plus:
+ le style classique et contemporain
+ les finitions argentées des cadrans
+ la forme des aiguilles
+ les prix, bien positionnés compte tenu de la qualité de l'exécution
Les moins:
- l'épaisseur du boîtier du Chrono Monopoussoir
- des réserves de marche un peu courtes