La collection Navitimer 8 a fait couler beaucoup d'encre depuis sa présentation en début d'année. Elle est à ce jour l'incarnation la plus visible des orientations stratégiques de la nouvelle équipe dirigeante de Breitling, avec Georges Kern à sa tête. Le fait justement de beaucoup parler de cette collection est une première victoire pour cette équipe: Breitling revient sur le devant de la scène avec une ambition renouvelée et une visibilité accrue.
Le chemin n'est cependant pas jonché de pétales de rose. Les principaux caractères esthétiques de la collection Navitimer 8 ont ainsi été largement contestés par une partie des aficionados de la marque qui furent surpris par le design plus épuré, par la forme de la lunette et, symbole parmi les symboles, par la suppression des ailes du logo. Mais la critique la plus récurrente eut trait à l'utilisation du nom Navitimer pour des montres qui ne possédaient pas de règle à calcul. Je peux comprendre cette remarque mais la stratégie de Breitling est limpide et logique: le nom Navitimer est tellement fort et ancré dans l'esprit du grand public qu'il aurait été dommage de ne pas l'utiliser dans un cadre plus large. De plus l'approche esthétique développée au sein de la collection était cohérente avec un des axes stratégiques de la marque: reconquérir une clientèle moins séduite par des montres à l'ambition professionnelle affirmée, aux rendus techniques et aux designs complexes. Georges Kern insistait beaucoup sur le fait que Breitling devait redevenir plus "accueillante" notamment auprès des segments de clients qui se s'étaient éloignés petit à petit de la marque. Tel est le but de la collection Navitimer 8 qui peut être considérée comme une collection de reconquête.
La version finale du cadran intégrera l'inscription 1884 sous Breitling:
Si le modèle phare Navitimer 8 est le chronographe à mouvement de manufacture B01, la montre de la collection qui peut finalement séduire les nouveaux clients comme les anciens est l'Unitime. C'est en tout cas mon point de vue et c'est la montre que je préfère au sein de cette collection. En fait, elle possède de nombreux atouts qui la rendent particulièrement séduisante tant du point de vue technique que du point de vue esthétique.
Tout d'abord, cette montre a sa place dans le catalogue Breitling. La marque a produit depuis fort longtemps des montres de voyage et plus récemment, plusieurs modèles proposaient la complication des heures universelles soit couplée avec un chronographe soit seule dans le contexte de la Galactic Unitime. Le grand atout de la Navitimer 8 Unitime est de rester dans l'esprit de certains modèles historiques qui ne proposaient que cette complication. La simplicité a toujours été la meilleure alliée des heures universelles car ces dernières ont une présence visuelle forte.
Je dois avouer que j'aime beaucoup cette complication. Elle est utile (permettant la lecture de l'heure rapide et simultanée sur 24 fuseaux), pratique et permet même de voyager dans sa tête en observant le long déroulement du temps sur les différentes villes de référence du globe. Elle est graphiquement séduisante en proposant deux disques périphériques, l'un dédié aux villes de référence et l'autre dédié aux 24 heures avec une distinction jour&nuit. Une montre à heures universelles offre toujours un rendu plus complexe et c'est dans ce contexte que l'approche épurée de la collection Navitimer 8 fait mouche. La Breitling Navitimer 8 Unitime m'apparaît ainsi harmonieuse et équilibrée. Sa taille de 43mm, qui pourrait être imposante dans d'autres contextes, me semble ici adaptée car permettant d'agrandir les disques et donc de les rendre lisibles. Le guichet de date aurait été trop proche du centre avec n'importe quelle autre montre: il est positionné idéalement sur le cadran de la Breitling Navitimer 8 Unitime à 6 heures.
La finition du cadran, disponible en noir ou en argenté est excellente. L'inclinaison du disque des villes de référence et le logo appliqué, évidemment sans aile, contribuent au rendu qualitatif. La finition argenté propose de très jolis reflets mais j'ai une préférence pour le cadran noir. Il apporte plus de punch et d'originalité à la montre et il a en plus la vertu de réduire la taille perçue. En revanche, je préfère les couleurs du disque des heures du cadran argenté.
Le boîtier en acier est totalement dans l'esprit de la collection. Grâce à la courbure de cornes, il se porte avec confort. Je retrouve la cannelure typique "Navitimer 8" de la lunette tournante et l'alternance des finitions polies et brossées qui symbolise l'utilisation d'un calibre de manufacture. Ce boîtier n'est pas d'une folle originalité mais il est bien exécuté. J'aurais cependant aimé que la montre soit moins épaisse car elle frôle les 15mm ce qui est un peu trop élevé à mon goût, malgré l'étanchéité de 100 mètres. Enfin, le verre saphir, légèrement bombé, traité anti-reflet double face rend les informations du cadran facilement accessibles.
Tel était le rendu du mouvement B35 sur le prototype de Bâle. J'attends de découvrir la version finale.
Une montre à heures universelles est pertinente lorsqu'elle est facile à utiliser. C'est le cas avec la Breitling Navitimer 8 Unitime grâce aux performances du calibre de manufacture B35. Il s'agit d'un mouvement très intéressant à analyser car apportant la preuve de l'intelligence de la conception du calibre B01.
En fait, Breitling est parti du calibre B01, a retiré la fonction chronographe (du fait justement de cette conception optimisée), l'a donc transformé en mouvement 3 aiguilles puis a rajouté un module spécifique à heures universelles. Ce module s'utilise intégralement à la couronne. La ville de référence (celle où l'on se trouve et dont l'heure est affichée par les aiguilles principales) est située à midi. Si le propriétaire de la montre se déplace dans un autre fuseau horaire, il suffit avec la couronne de positionner la ville de référence du nouveau fuseau à midi. Grâce à l'indépendance entre les deux disques, les heures des autres fuseaux se recalent automatiquement tout comme l'aiguille des heures principale. A noter que de la même façon, la date de la date locale s'ajuste automatiquement en avant ou en arrière ce qui n'est pas si simple à réaliser du point de vue technique. Compte tenu de ses origines B01, le calibre B35 a des performances logiques (et appréciables) avec une fréquence de 4hz, une réserve de marche généreuse de 70 heures et une certification chronomètre.
Le mouvement est visible à travers le fond transparent du boîtier ce qui permet de juger du sérieux de sa conception. En revanche, son diamètre propre est un peu juste pour la taille de la montre (même si cela ne se ressent pas côté cadran) et sa finition (sur le modèle que j'ai vu à Bâle) est trop austère selon moi. J'aurais par exemple aimé plus d'ambition dans la décoration de la masse oscillante.
Son bilan n'est certes pas parfait mais la Breitling Navitimer 8 Unitime n'en demeure pas moins une belle réussite. Je la considère d'ailleurs comme la montre la plus convaincante de cette nouvelle collection. Sa complication me plaît, son étanchéité et sa luminescence lui donnent un caractère polyvalent, son exécution est irréprochable et son mouvement est de qualité et facile à utiliser. De plus, la présence des deux disques périphériques redonnent une dimension technique à la montre ce qui peut satisfaire ceux qui regrettaient la disparition de la règle à calcul. Au final, je suis heureux que cette montre porte le nom de Navitimer. Car sa complication m'invite au voyage. Comme quoi, même sans aile, le B de Breitling conserve toujours son aura et son pouvoir de séduction.
La Breitling Navitimer 8 Unitime est disponible en acier avec un bracelet croco au prix de 7.400 euros et avec un bracelet métal au prix de 7.700 euros.
Les plus:
+ la montre de la collection Navitimer 8 la plus réussie esthétiquement
+ les performances du calibre B35
+ une montre très pratique à l'usage avec une complication utile
+ la finition des cadrans
Les moins:
- l'épaisseur du boîtier
- la décoration du mouvement est trop austère