"Je vole comme le papillon et pique comme
l'abeille!": la célèbre citation de Mohamed Ali pourrait presque
s'appliquer à Tag Heuer qui, sous l'impulsion de l'infatigable
Jean-Claude Biver, se retrouve actif sur de nombreux fronts. Les
relations avec le champion avaient été initiées avant son décès, Tag
Heuer souhaitant s'associer à l'image de Mohamed Ali dont l'aura
dépassait largement le cadre purement sportif. En fait, le lien entre
Tag Heuer et la boxe est loin d'être incongru car Heuer dédia la
Ring-Master, créée en 1957, à la mesure des temps des combats de boxe
professionnels (15 rounds de 3 minutes avec 1 minute de repos) ou
amateurs (le même principe avec des rounds de 2 minutes). Cette montre
utilisait deux graduations spécifiques que nous retrouvons sur la
Carrera Calibre 5 - Hommage à Mohamed Ali. Enfin, n'oublions pas que
Jean-Claude Biver avait déjà été en contact avec le monde de la boxe
comme l'attestent les 12 pièces uniques de la Hublot "King Power World
Boxing Council" ou le partenariat avec Floyd Mayweather.
Le
moins que l'on puisse attendre d'une montre dédiée au noble art est
d'être percutante et la Carrera Calibre 5 - Hommage à Mohamed Ali l'est
incontestablement. Grande (43mm de diamètre) sans être immense, offrant
de beaux contrastes de couleurs entre le blanc, le rouge et le noir,
elle se distingue par sa qualité perçue. Le cadran en noir opaline
contribue beaucoup à ce sentiment en étant très lumineux malgré sa
dominante sombre. Les informations de la graduation intérieure (celle
faisant référence à la boxe amateur) et de la graduation extérieure
tournante (grâce à la couronne située à gauche du boîtier) se lisent
aisément tout comme les aiguilles polies et facettées à la discrète
luminescence. Tag Heuer a particulièrement soigné le jeu des couleurs et
évité un effet trop bariolé. J'apprécie aussi le rappel du rouge à
travers le liseré de la couronne et les coutures du bracelet.
Le diamètre du boîtier en acier est évidemment trop grand pour le Calibre 5 mais alors que ce genre de constatation est souvent problématique, un miracle se produit ici. Le guichet de date étant éloigné du bord de la lunette, le 30 des minutes peut être logé sur le cadran sans être coupé. Et comme Tag Heuer a eu le bon goût d'utiliser un disque de date noir, la date est très bien intégrée même si je m'en serais aisément passé.
Mon point d'interrogation concerne l'imposante signature du champion qui traverse une grande partie de la zone inférieure du cadran. Je peux comprendre la volonté d'affirmer l'engagement avec Mohamed Ali. Mais le fond gravé comportant le portrait du boxeur avec l'inscription "Tribute to Mohammed Ali" aurait selon moi suffi. Certes, cette signature a une vertu esthétique: elle rééquilibre le cadran en créant une symétrie avec le logo situé dans la zone supérieure. Mais la taille de la signature et le style écrit à la main jurent un peu avec les autres éléments du cadran. De plus, cette signature réduit le potentiel de clients puisqu'il faut vraiment être un fan absolu de Mohamed Ali pour apprécier sa signature permanente sur le cadran. Or on peut tout à fait aimer la boxe et profiter des caractéristiques de cette montre sans se sentir lié à un champion en particulier. Je trouve donc cette décision étrange.
En revanche, le fond gravé est le bienvenu. Au-delà de sa décoration, il permet de cacher le calibre 5 qui est en fait un Sellita SW200. Ce mouvement est fiable et répandu et il animera la montre sans souci. En revanche, son diamètre fait qu'il aurait été visuellement perdu dans le boîtier. Et comme il n'est pas non plus d'une beauté époustouflante, le fond gravé devient tout indiqué.
La Carrera Calibre 5 - Hommage à Mohamed Ali est une montre qui fait une très jolie impression lorsqu'elle est mise au poignet. La finition du cadran est excellente et le jeu de couleurs est à la fois vif et élégant. La taille du boîtier est évidemment conséquente mais elle est cohérente avec l'univers de la boxe et des poids lourds: on n'est pas là non plus pour évoquer le thé de cinq heures dans des tasses en porcelaine! J'ai donc apprécié la démarche de Tag Heuer qui aborde un thème rare dans l'horlogerie et qui délivre une montre au bilan très positif et au caractère polyvalent (l'étanchéité étant de 100 mètres). Le sans-faute n'était pas loin mais à défaut d'une victoire par KO, Tag Heuer devra se contenter d'une victoire aux points: la signature sur le cadran est malheureusement trop segmentante et constitue pour moi un frein, ce qui est dommage compte tenu de la qualité globale de la pièce.
Les plus:
+ un thème rarement abordé dans l'horlogerie
+ la finition du cadran
+ le jeu de couleurs, vif et élégant
+ le fond plein
Les moins:
- la signature sur le cadran est de trop
- le guichet de date n'est pas non plus indispensable même s'il est bien intégré sur le cadran