A l'annonce de la sortie d'un chronographe El Primero célébrant le
partenariat entre Zenith et Range Rover, je me suis immédiatement fait
la réflexion que la montre devrait faire preuve de la même capacité de
franchissement d'obstacles que le véhicule dont elle s'inspire pour
arriver à convaincre. Car, à brûle-pourpoint, ce chronographe
n'apparaissait pas comme une évidence! Encore un nième partenariat entre
une manufacture et une marque de voitures, encore une déclinaison du
chronographe El Primero et encore un lien un peu tiré par les cheveux
entre deux maisons...
Et pourtant, la Zenith El Primero
Range Rover finit par arriver à destination sans encombre ni sortie de
piste. La raison de ce résultat est simple: ce chronographe est une
des plus belles réussites esthétiques de Zenith de ces dernières années.
Mieux que cela: il définit ce que pourrait être la ligne directrice
stylistique d'un chronographe El Primero résolument contemporain et
audacieux.
En tout cas, au-delà de ses qualités, le point
de départ de cette montre ne pouvait que me réjouir: Zenith et Range
Rover ont scellé leur partenariat pour célébrer une année clé dans leurs
histoires respectives: 1969. Année de présentation du chronographe El
Primero et du prototype du Range Rover, elle est également, plus
modestement, mon année de naissance!
Ce n'est
évidemment pas ce qui me fait apprécier ce chronographe. En fait, il y a
deux éléments clé qui contribuent à son pouvoir de séduction: son
boîtier et son cadran.
Le boîtier est réalisé en
aluminium céramisé noir mat. Sa légèreté rend son porté très agréable et
confortable. Le rendu de la couleur dominante est intéressant car il
s'agit d'un noir vif et dynamique qui crée de beaux reflets lumineux. Le
boîtier est donc beaucoup plus subtil et raffiné que je ne l'imaginais
de prime abord. Son autre atout est de réduire la perception de la
taille compte tenu de sa couleur. De fait, la montre, une fois mise au
poignet, donne l'impression d'être plus proche des 40/41mm que du
diamètre réel, 42mm.
Le boîtier a de plus la mission de
mettre en valeur le cadran car ce dernier constitue bel et bien le clou
du spectacle. J'ai rarement vu un cadran offrir un tel éventail
chromatique. Présenté par Zenith comme un cadran "gris brossé", il
surprend par sa capacité à se transformer selon les conditions de
lumière et l'inclinaison du poignet. Naviguant entre l'anthracite, le
gris clair voire le bronze, le cadran anime le chronographe, crée des
reflets inhabituels et constitue un vrai régal pour les yeux. Je dois
avouer que pour une montre "sombre", le chronographe El Primero Range
Rover m'est apparu comme plutôt coloré!
Mais attention, coloré ne veut pas dire bariolé:
les designers ont particulièrement bien travaillé afin de veiller à la
cohérence de l'ensemble. Même le rehaut (sur lequel se trouve l'échelle tachymétrique) semble se fondre entre le
boîtier et le cadran tout comme le guichet de date dont l'intégration
semble quasi parfaite. Quasi et pas totalement car malheureusement, ce
guichet coupe la graduation du chronographe et rend la lecture du temps
affiché par la trotteuse centrale impossible pendant quelques
secondes. Il aurait été judicieux de reprendre la graduation au sommet
du guichet mais le choix a été fait de préserver la pureté de
l'ensemble.
D'un autre côté, et c'est une excellente
nouvelle, le chronographe El Primero Range Rover corrige un problème qui
se manifeste sur certaines pièces de Zenith en redonnant la priorité du compteur
des minutes sur celui des heures. Ce compteur des minutes, ainsi que le
sous-cadran de la trotteuse sont légèrement en relief et cette petite
touche accroît la qualité perçue de la montre. La présentation du cadran
est donc extrêmement aboutie du point de vue esthétique et chromatique
et malgré le faible contraste entre les aiguilles du chronographe et le
cadran, les données du chronographe demeurent correctement lisibles. La lecture de l'heure principale est aisée grâce aux aiguilles rhodiées et revêtues de SuperLuminova. De
plus, le fait que les sous-cadrans et compteurs soient de la même
couleur que le cadran rend la montre plus équilibrée.
L'élément
le moins surprenant est le mouvement. Le chronographe El Primero Range
Rover est en effet équipé du mouvement El Primero 400B d'une fréquence
de 5hz et dont la réserve de marche se situe autour d'une cinquantaine
d'heures. Il présente toutefois une originalité: la présence de "Range
Rover" sur la masse oscillante en lieu et place du traditionnel
"Manufacture Le Locle". Si je mets de côté le cas particulier des
montres liées au Rolling Stones, c'est la première fois qu'un
co-branding avec Zenith débouche sur un tel honneur. La grande force du
mouvement El Primero se révèle à l'usage. Fiable et précis, d'une
excellente efficacité au remontage, il anime sans souci la montre et
séduit par sa présentation. Le mouvement El Primero demeure un des plus
agréables à observer grâce à son architecture. Sa finition est simple et
soignée, sans effet particulier. J'aurais cependant aimé retrouver une petite touche particulière sur la décoration du mouvement rappelant l'atmosphère de la montre côté cadran.
L'évocation du "Range
Rover" sur la masse oscillante renvoie immédiatement à l'inscription sur le cadran. Car il y a un détail important que je n'ai pas évoqué. Les
mots "Range Rover" sont également apposés sur le cadran ce qui peut
générer un trouble chez les fans de la manufacture à l'étoile. Et de
nouveau, Zenith franchit l'obstacle en rendant cette inscription
extrêmement discrète. Pourtant positionnée sous le "Zenith", elle laisse
le premier rôle à la marque horlogère grâce à une largeur maîtrisée et
une police de caractère plus petite. A aucun moment je ne fus dérangé
par cette inscription qui a tendance à se faire oublier.
J'ai
donc beaucoup aimé cette montre. Elle joue sur plusieurs paradoxes pour
séduire. Elle est classique et très moderne à la fois. Elle est sombre
mais lumineuse. Elle rend hommage à Range Rover mais ce lien demeure
discret. Les éléments se fondent dans un même ensemble mais elle reste
très lisible. La petite touche finale est apportée par un agréable et
plutôt original bracelet en caoutchouc recouvert de cuir de veau
perforé de couleur ivoire ou bleu. Et comme le confort est au
rendez-vous, il est difficile de résister face à cette montre qui est
pour moi une des montres Zenith les plus abouties depuis plusieurs
années.
Si vous souhaitez en savoir plus sur la stratégie de Jean-Claude Biver, je vous conseille l'excellente interview publiée sur Watch-Her qui apporte des éléments de contexte notamment sur le chronographe El Primero Range Rover.
Merci à l'équipe Zenith France.
Les plus:
+ une réussite esthétique donnant une dimension plus contemporaine au chronographe El Primero
+ les reflets de couleurs du cadran
+ le confort au porter
+ la fiabilité et la précision du mouvement El Primero 400B
Les moins:
- la graduation du chronographe est coupée au niveau du guichet de date
- un peu plus d'ambition au niveau de la décoration du mouvement aurait été appréciée