A l'initiative de la Fondation de la Haute Horlogerie, 9 marques indépendantes, et non des moindres (Christophe Claret, De Bethune, H. Moser & Cie, Hautlence, HYT, Kari Voutilainen, Laurent Ferrier, MB&F et Urwerk), vont rentrer dans le saint des saints horloger, le SIHH lors de sa prochaine édition en janvier 2016. Il s'agit véritablement d'un événement majeur qui selon moi, aura des répercussions positives pour toutes les parties.
Depuis de nombreuses années, la semaine du SIHH ne démarrait pas le lundi mais bien le dimanche voire même le samedi pour les plus courageux avec les présentations des marques indépendantes dans les hôtels du centre de Genève. Et il faut bien l'avouer, l'organisation du SIHH devait de plus en plus tenir compte de ces présentations parallèles en essayant de regrouper les brebis (détaillants, journalistes, blogueurs et collectionneurs) égarées qui malgré les invitations officielles du Salon n'hésitaient pas à s'éparpiller dès que possible en dehors de Palexpo. Le Carré des Horlogers, nouvel espace de 1.500 m2 au sein du SIHH, remet l'église au centre du village: l'événement, c'est le SIHH et pas les rendez-vous dans les hôtels. Amusant d'ailleurs que ce terme de "Carré des Horlogers"... un peu comme si les marques autour avaient perdu cette proximité avec le métier de base du secteur d'activité. On y sent presque l'aveu que les marques traditionnelles du SIHH étaient devenues avant tout de grandes machines.
L'arrivée de ces 9 nouvelles marques indépendantes (même si deux d'entre elles appartiennent au même groupe, MELB de Georges-Henri Meylan qui fait ainsi son grand retour au SIHH) est en tout cas une excellente nouvelle pour toutes les parties.
Pour les 9 marques d'abord qui vont pouvoir profiter des parfaites logistique et organisation du SIHH. Elles vont également tirer parti de l'exposition incomparable du SIHH. Car le SIHH demeure un salon à taille humaine et il est beaucoup plus facile d'être audible dans un concert de 24 marques qu'à Baselworld où des centaines et des centaines de marques communiquent en même temps. D'ailleurs, il est intéressant de remarquer que certains de ces nouveaux participants avaient déjà tendance à présenter plus de nouveautés pendant la semaine du SIHH que pendant Baselworld dans la pure logique d'une meilleure visibilité.
Pour le SIHH ensuite qui trouve avec le Carré des Horlogers une impulsion dynamique et une façon intelligente de s'étendre et de s'ouvrir sans abandonner ses critères d'exclusivité. Car il faut bien l'avouer, le plateau est véritablement impressionnant et extrêmement diversifié. L'horlogerie classique est à l'honneur avec Laurent Ferrier, Kari Voutilainen, Moser, l'horlogerie créative est représentée avec Urwerk, HYT, MB&F et Hautlence tandis que De Bethune et Christophe Claret peuvent être considérés comme des synthèses de ces deux dimensions. Le SIHH ne peut que tirer profit de ces marques qui, si elles n'ont pas auprès du grand public la même résonance que les acteurs généralistes de Richemont n'en demeurent pas moins des références auprès des collectionneurs en termes de finition, d'innovation technique ou d'audace esthétique. Elles sont même plus que cela: elles peuvent initier des tendances ce qui ne peut être que réjouissant face à certaines marques qui veillent à minimiser les risques et dont la démarche créative ne soutient que des business plans calibrés. Un peu d'excitation ne pourra donc pas faire de mal dans un Salon dont l'offre de ces dernières années, certes de qualité, m'est apparue comme manquant de véritables surprises.
Enfin, l'ouverture du Carré des Horlogers est une excellente opportunité de rencontres et d'échanges entre les équipes. J'ai toujours pensé que la remarquable organisation du SIHH avait un revers pour le personnel des marques présentes: le manque de contacts avec la concurrence et de stimulation liée à l'observation des créations des horlogers, petits ou grands. C'est la force de Baselworld, cette effervescence, ce mélange, cette ouverture, ce sentiment de passer en quelques secondes d'une marque à 800.000 montres par an à un horloger qui en fabrique 10. Le Carré des Horlogers est une formidable vitrine de l'inventivité, de l'inspiration et de la réactivité des "petites" marques. Cette présence ne peut que profiter et donner des idées aux marques établies qui elles aussi ne manquent pas de talents, peut-être soumis à plus de contraintes pour s'exprimer totalement. Si la Carré des Horlogers contribue à libérer les énergies du SIHH, ce qui apparaît comme une excellente nouvelle se transformera en véritable réussite.
J'attends donc de découvrir avec une très grande impatience ce SIHH 2016 qui s'annonce d'ores et déjà comme propice à des oppositions de style et à des rencontres étonnantes.