L'Elysium Classic de Leinfelder est un excellent exemple de la vitalité de l'horlogerie allemande. Derrière son apparence classique se cache un mouvement spectaculaire créé par Uhren-Werke-Dresden (UWD) qui est la manufacture fondée par Marco Lang dont la vocation est de concevoir et de produire des mouvements à l'attention de marques clientes. Leinfelder est de son côté une boutique située dans le centre historique de Munich qui commercialise une gamme de montres sous son propre label. En fait les trajectoires de Leinfelder et de Marco Lang sont bien plus liées qu'une pure relation de client à fournisseur. Ulrich Rohde, un des cofondateurs de Leinfelder, cherchait un horloger capable de développer le mouvement répondant à ses attentes. La rencontre avec Marco Lang déboucha sur la création d'un véritable groupe horloger qui structure toute l'activité du talentueux membre de l'AHCI: sa propre marque Lang&Heyne, la manufacture UWD, Leinfelder et la célèbre boutique de Dresde dédiée à l'horlogerie indépendante, Hartding. Il est donc intéressant d'observer l'Elysium Classic car elle témoigne des capacités d'UWD tant du point de vue technique qu'esthétique.
L'Elysium Classic ne bouleverse pas les codes esthétiques des montres qui fleurent bon la tradition horlogère. Elle possède un boîtier d'un diamètre de 42mm en or gris ou en or rose. Son cadran blanc intègre certains ingrédients qui se retrouvent régulièrement sur les pièces classiques allemandes dont le chemin de fer de la minuterie parsemé d'index en forme de losange et les chiffres romains. Il est extrêmement équilibré car malgré la taille du boîtier, son ouverture demeure raisonnable du fait de l'épaisseur de la lunette. De plus, la finesse et la longueur des chiffres ainsi que la taille respectable du secteur de la trotteuse rendent l'ensemble très proportionné. Un détail est en revanche plus original: les graduations de la trotteuse sont rouges ce qui est inhabituel. Le logo de la marque est bien intégré même si je trouve que les lettres auraient mérité d'être un peu plus petites.
Ce sont les aiguilles qui me séduisent le plus côté cadran. Elles sont à la fois fines, élégantes et de caractère. J'apprécie particulièrement celle des minutes dont le segment médian est d'une rare étroitesse. Leurs flèches à deux pans sont d'une grande beauté et apportent la preuve d'une exécution sans faille. Au-delà de leur charme, elles contribuent à l'excellente lisibilité de la pièce ce qui en soi n'est pas non plus un exploit compte tenu du cadran blanc et de l'absence de complication.
Le boîtier est plus surprenant que le cadran. Tout comme les aiguilles, il est fabriqué en interne. Du fait de sa forme concave, il donne l'impression de créer une sorte de godron comme si l'ensemble cadran et lunette était posé sur une base élargie. Les cornes sont clairement inspirées par des montres du passé et complètent élégamment le design du boîtier. La couronne oignon facilite le remontage et la mise à l'heure grâce à une manipulation aisée. A noter que le bracelet est positionné très près du boîtier ce qui permet de réduire la taille perçue de l'ensemble.
Il aurait été très facile pour Marco Lang de nous resservir à travers UWD un mouvement reprenant l'ensemble des éléments de style de l'horlogerie allemande: les chatons en or, les vis bleuies et les platine trois-quarts. La bonne nouvelle est qu'il a souhaité proposer une nouvelle approche esthétique même si l'architecture du calibre en elle-même demeure traditionnelle. Le mouvement à remontage manuel L-H01 qui équipe l'Elysium Classic est d'une taille respectable (33mm) tout en restant relativement fin (4mm). Ses dimensions expliquent d'ailleurs pourquoi le cadran est si équilibré avec un sous-cadran idéalement placé.
Si ses performances sont traditionnelles (une fréquence de 3hz pour une réserve de marche d'une cinquantaine d'heures), sa présentation est beaucoup plus originale, surtout dans un contexte allemand. L'objectif poursuivi par Marco Lang a été de rendre le plus visible possible les différentes pièces mobiles dont notamment les roues. C'est la raison pour laquelle leurs ponts comportent un segment évidé. La roue d'échappement est ainsi clairement visible ce qui est un vrai régal! J'aime beaucoup également la pureté du système de réglage du balancier à masselottes. La finition noircie des ponts et platines permet de créer un contraste suffisant avec les pièces mobiles et donne un style très contemporain au mouvement ce qui surprend un peu compte tenu du design de la montre. J'aime ce type d'opposition car deux univers semblent cohabiter: d'un côté celui de la tradition, de l'autre, celui de l'innovation. En tout cas, Marco Lange fait mouche avec ce mouvement qui place l'Elysium Classic à un niveau inattendu.
Mais une montre n'est pas seulement un mouvement et j'ai pris beaucoup de plaisir à la porter. J'avais un peu peur au départ que sa taille soit trop importante pour une pièce habillée mais la forme du boîtier réduit l'ouverture du cadran. Ses atouts du point de vue esthétique sont l'équilibre du cadran et la forme des aiguilles qui dégagent beaucoup de charme. Le mouvement UWD complète un tableau très convaincant et très surprenant pour une montre en provenance d'une boutique munichoise. Le moins que l'on puisse dire est que cette dernière profite pleinement de son appartenance au Groupe Tempus Arte pour proposer une des montres allemandes à remontage manuel les plus séduisantes de ces dernières années.
Merci à l'équipe Leinfelder pour son accueil à Baselworld.
Les plus:
+ le contenu horloger et l'esthétique du mouvement UWD
+ l'équilibre du cadran
+ la beauté des aiguilles
+ le contraste entre la présentation de la montre et la finition du mouvement
Les moins:
- le nom de la marque est un peu grand sur le cadran
- la forme du boîtier permet de contrôler la taille perçue mais a contrario rend la lunette un peu trop épaisse pour une montre habillée