Tommaso Barracco est arrivé en peu de temps à créer ce qui est le plus difficile à obtenir dans le contexte d'un nouveau projet horloger: une véritable identité de marque. Grâce à la cohérence de la collection et aux éléments stylistiques partagés par les différentes pièces qui la composent, une montre BarraccO se reconnaît aisément. La forme du boîtier et la finition décorative du cadran caractérisée par le motif "increspato" contribuent fortement à la définition de cette identité. Elle est maintenant clairement établie et les dernières évolutions de la Giramondo et de l'Electum le prouvent. Malgré un traitement esthétique inhabituel pour la marque, elles n'ont aucune difficulté à conserver leur air de famille et leur ancrage dans la collection.
En cette rentrée, la Giramondo et l'Electum se parent donc d'un habillage noir du plus bel effet. Il ne s'agit évidemment pas d'une révolution horlogère puisque les montres noires sont légion. Encore faut-il que cette nouvelle finition se marie avec le style initial des deux pièces. Je pense sincèrement que c'est l'Electum qui gagne le plus dans cette évolution esthétique même si la Giramondo s'en sort avec les honneurs.
L'Electum est à ce jour la montre la plus ambitieuse de Tommaso Barracco. Pas du point de vue horloger: après tout, elle est structurée comme les autres montres de la collection en étant équipée d'un mouvement basé sur un calibre Soprod 9351. Ni du point de vue qualitatif: l'homogénéité est la grande force de la marque. L'Electum se distingue par son interprétation, par le rapport au temps qu'elle crée et par les différentes façons de vivre avec. L'idée directrice de l'Electum est de clairement séparer les différentes fonctions du cadran. L'affichage de l'heure est décentré en bas du cadran. La date à double-guichet est en revanche positionnée en haut. L'heure et la date sont insérés dans des cercles distincts comme pour mieux souligner leur séparation. Les deux cercles esquissent un huit qui pourrait symboliser l'infini. La trotteuse centrale parcourt en revanche l'ensemble du cadran en suivant une graduation périphérique qui lui est dédiée.
Le propriétaire de la montre se trouve ainsi face à plusieurs possibilités: son regard peut se porter en priorité sur l'affichage qui lui semble être le plus important ou appréhender la montre dans sa globalité. La trotteuse symbolise le temps qui s'écoule rapidement, en perpétuel mouvement. L'affichage de l'heure évolue de façon plus paisible et l'absence de trotteuse dans le cercle qui lui est dédié renforce ce côté plus lent. Enfin, la date semble immobile. Ces différents rythmes sont nettement perceptibles et au bout du compte, notre instinct aura tendance à privilégier celui qui correspond le mieux à notre style de vie. Pour certains, chaque seconde est importante et la trotteuse deviendra alors leur aiguille favorite. Pour d'autres, l'heure a peu d'importance et l'indication de la date est plus pertinente: le double-guichet sera alors l'élément clé. Finalement, l'Electum n'impose rien, elle suggère, elle propose.
La finition noire s'adapte avec bonheur à ce contexte. J'aime beaucoup la finition sablée de la lunette qui crée un léger contraste avec la carrure du boîtier. Compte tenu de la couleur dominante, la montre semble plus petite que les autres versions alors que le diamètre (41,5mm) et l'épaisseur (11mm) demeurent identiques. Le cadran gagne selon moi en subtilité. Le noir du motif "increspato" est intéressant à observer car selon l'inclinaison du poignet, il peut tendre vers le gris ou le noir plus profond. Le rouge de la trotteuse est cette fois-ci bien mis en valeur. Il agrémente le cadran et fait un rappel avec le nom de la montre de la même couleur.
Le point d'interrogation concerne la date. Le double-guichet blanc la fait ressortir du cadran ce qui peut apparaître comme une entorse au principe de l'Electum puisqu'un affichage prend le dessus sur les autres. Pour la lisibilité, c'est évidemment un plus. En revanche, je pense que la montre aurait été encore plus réussie si ce double-guichet avait été noir. Malgré cette remarque, l'Electum Nero m'a plus convaincu que dans ses versions alternatives, un peu comme si le noir renforçait la dimension énigmatique de la montre.
Le fond du boîtier reste plein ce qui est une bonne nouvelle. Le pendule le décore joliment et la vue du mouvement Soprod n'aurait rien apporté. Les performances de ce dernier sont classiques avec une fréquence de 4hz et une réserve de marche de 42 heures.
Montre plus subtile qu'elle n'en a l'air au départ, toujours aussi confortable grâce à l'efficacité de la boucle déployante, elle possède les atouts pour donner une projection supplémentaire au travail de Tommaso Barracco.
Merci à l'équipe de la boutique Les Montres.
Les plus:
+ la finition du boîtier
+ les reflets créés par le motif "increspato"
+ le concept de l'Electum et l'organisation du cadran
+ le confort au porté
Les moins:
- un double-guichet noir aurait été plus adapté au contexte particulier de l'Electum