Ce qui est appréciable avec François-Paul Journe, c'est qu'il n'hésite pas à revisiter ses classiques. Pourtant, l'exercice peut être dangereux car il y a toujours le risque de décevoir si l'évolution n'est pas à la hauteur de la réussite de l'original. Et lorsque la montre concernée est une base de la collection, la marge d'erreur est extrêmement faible.
Pourtant, il s'est attaqué au Chronomètre Souverain en présentant pendant la semaine du SIHH à Genève un nouveau style de cadrans en or. Le Chronomètre Souverain est, je le rappelle, une montre fondamentale dans sa collection. Elle n'est pas à proprement parler l'entrée de gamme puisque à ce niveau d'exécution, cette connotation est inappropriée. Elle est certes la plus abordable mais surtout la plus simple avec son mouvement à remontage manuel et pour unique complication, en dehors de la trotteuse décentrée, l'affichage de la réserve de marche. Or nous savons tous qu'il est extrêmement difficile de réaliser une montre simple de haute horlogerie car la spécificité d'une complication n'est pas là pour la tirer vers l'excellence. Une montre simple dans ce segment est réussie lorsqu'elle arrive à transmettre, malgré ses fonctions réduites à l'essentiel, tous les critères d'excellence et l'absence de compromis de la manufacture dont elle provient.
C'est le cas du Chronomètre Souverain qui, au-delà de sa réalisation soignée conforme aux standards de qualité de la manufacture, incarne un certain nombre d'idées chères à François-Paul Journe pour atteindre la meilleure précision possible. Le mouvement à remontage manuel 1304 se caractérise par son double-barillet pour un couple optimal, par un organe régulant particulier (un balancier à 4 masselottes, une absence de raquette, un spiral plat etc...) et par une fréquence à 3hz qui est un bon compromis entre consommation de l'énergie, précision et régularité de marche. Mis en valeur par une décoration raffinée et subtile, le mouvement 1304 présente une découpe des ponts qui isole l'organe régulant et qui dévoile légèrement les deux barillets: ce spectacle, finalement plutôt original pour une montre classique, est un vrai régal pour les yeux.
Cependant, la nouveauté ne se situe pas côté mouvement: en modifiant la présentation et le style des cadrans, François-Paul Journe apporte un nouveau dynamisme à son Chronomètre Souverain. Réalisés en or, ces nouveaux cadrans se distinguent par l'absence de guillochage de la partie centrale, par la finesse des chiffres et par le très jolie contraste entre la base en opalin argenté grainée et les détails en relief. Je fus particulièrement séduit par la qualité et la précision du rendu des chiffres qui arrivent à conserver toute leur finesse malgré l'effet de relief.
La suppression du guillochage central entraîne deux conséquences: la première est que la montre semble plus pure et plus grande que son équivalente de même taille de la version initiale. La seconde est qu'elle met plus en valeur l'affichage de la réserve de marche et le sous-cadran décentré.
Cette nouvelle animation de cadran est disponible dans des boîtiers en or rouge ou en platine et dans les deux dimensions habituelles à savoir 38 ou 40mm. Dans chaque cas, la couleur des détails et des aiguilles est mise en cohérence avec celle du boîtier. Les aiguilles sont en argent rhodié et le cadran est en or gris pour la version platine. Les aiguilles et le cadran sont en or rouge pour la version en or rouge.
Incontestablement, c'est cette dernière que je préfère: plus chaleureuse, offrant plus des contrastes plus forts, elle s'accommode mieux selon moi du style plus dépouillé. En fait, je trouve la version platine trop discrète même si elle conserve le caractère séduisant des nouveaux cadrans en or. Dans tous les cas, cette évolution du Chronomètre Souverain présente un intérêt certain car elle arrive à créer une rupture esthétique nette par rapport au modèle d'origine. Comme souvent, il suffit de quelques détails pour transformer une montre. François-Paul Journe nous en fait une nouvelle fois la démonstration.
Merci à l'équipe F.P. Journe pour son accueil à Genève.
+ le plaisir de retrouver le Chronomètre Souverain et son mouvement 1304
+ la parfaite exécution des cadrans en or et particulièrement des chiffres en relief
+ la disponibilité des deux tailles de boîtier
Les moins:
- la version platine manque un peu de punch selon moi