L'Upside Down fait partie de ces montres qui sont d'apparence très simples mais qui se révèlent très ingénieuses. Grâce à son talent et à sa malice, Ludovic Ballouard réinvente l'heure sautante en proposant une animation de cadran unique. Lorsque la grande aiguille centrale atteint la 60ième minute, la pastille sur laquelle se trouve le chiffre correspondant à l'heure qui débute effectue une rotation instantanée à 180° pour se positionner à l'endroit. La pastille précédente fait de même pour que le chiffre se retrouve à l'envers. Alors que de prime abord, l'Upside Down semble être une montre résolument classique, très vite son côté incongru et ludique apparaît: l'absence de l'aiguille des heures est troublante tout comme le positionnement des chiffres. A vrai dire, le non-initié pourrait avoir l'impression que la montre se porte à l'envers! La lecture de l'heure est d'ailleurs un peu déroutante lors des premiers instants. Mais elle est facilitée par la présence d'un petit point sur chaque pastille qui devient visible lorsque le chiffre est à l'endroit.
Un tel affichage nécessite un mouvement particulier et Ludovic Ballouard a développé pour répondre aux contraintes liées aux rotations des pastilles un système fondé sur des croix de Malte qui, au-delà de son apport en ce qui concerne la précision des sauts, évite un pic trop important de la consommation d'énergie du mécanisme. Certaines parties du mouvement reprennent des éléments du Peseux 7001 ce qui a permis à Ludovic Ballouard de se concentrer essentiellement sur les performances et la fiabilité de l'affichage. Compte tenu du calibre de base, la fréquence du mouvement est de 3hz. La réserve de marche de 36 heures est en revanche en légère réduction par rapport à la quarantaine d'heures habituelles en raison du module d'affichage.
L'Upside Down, suite à sa première présentation fin 2009, fut déclinée en différentes versions à cadrans gris, bleu ou noir, avec ou sans sertissage. L'Upside Down à cadran en marqueterie de nacre a été dévoilée en 2013. Elle propose une technique décorative de son cadran qui tranche par rapport à celles de ses devancières. Le choix de la marqueterie de nacre peut surprendre: après tout, le côté délicat et subtil d'une telle décoration paraît mieux convenir à une montre féminine ou de soirée. Cependant, une sorte de magie opère et le système d'affichage du temps est mis en valeur par ce nouveau rendu de cadran.
Tout repose sur la finition du cadran. Le principe fondamental est l'utilisation d'une nacre bicolore qui permet de créer une sorte de kaléidoscope qui, partant du centre de la montre, converge vers les pastilles des chiffres des heures, elles-même nacrées. Les éléments centraux entourent les pastilles, épousent leurs formes pour dessiner une représentation d'un parapluie ouvert. Le résultat est tout simplement d'une rare beauté. Les couleurs se mélangent, les reflets se multiplient et c'est toute l'animation du cadran qui s'en trouve transformée. De la même façon que les pastilles tournent pour afficher l'heure, le kaléidoscope central évolue, se modifie selon l'inclinaison du poignet ou de la lumière qui frappe le cadran. Face à un tel spectacle, le sous-cadran de la trotteuse m'est presque apparu comme superflu et je me demande même si la montre n'aurait pas été encore plus réussie sans.
Fort heureusement, la lisibilité n'est pas impactée par la nacre bicolore. L'aiguille des minutes en acier bleui demeure parfaitement visible et les chiffres (ainsi que le petit point si important) se distinguent sans souci. Incontestablement, cette Upside Down est la plus chaleureuse, la plus enjouée de toutes! La décoration du cadran ne la rend pas plus complexe face à la sobriété des autres versions: elle apporte en revanche une dose de charme et d'élégance supplémentaire.
Un tel aboutissement n'est pas le fruit du hasard. Le cadran, réalisé de main de maître par Gilwatch (dont l'atelier se trouve dans le même bâtiment que celui de Ludovic Ballouard) comporte 60 composants différents ce qui explique le jeu de lumière qu'il provoque. Les 41mm de diamètre de la montre s'oublient d'ailleurs car le remplissage du cadran réduit la perception de la taille.
Je parlais précédemment de lisibilité. Pour être franc, le vrai problème de cette Upside Down est qu'une fois portée, la lecture de l'heure pourrait sembler accessoire car l'animation des reflets du kaléidoscope central attire irrémédiablement le regard! Heureusement, sa forme qui le fait déboucher sur les pastilles rappelle que les éléments clé de la montre sont ces petits disques rotatifs qui rendent l'Upside Down si spéciale. La forme du boîtier et des cornes, courtes et galbées permet un excellent positionnement sur le poignet. Le poids du platine se ressent car le boîtier demeure relativement massif comme le prouve l'épaisseur de la lunette. C'est un sentiment que j'apprécie.
L'Upside Down à cadran en marqueterie de nacre est disponible en 12 exemplaires en platine et en 12 exemplaires en or rose. Avec cette série limitée, Ludovic Ballouard donne une nouvelle dimension à son Upside Down en lui apportant une touche artistique et de charme qui s'adapte parfaitement au contexte de l'affichage. Je la considère donc comme l'Upside Down la plus aboutie.
Merci à Ludovic et à Masa pour leur accueil pendant le Salon QP 2013.
Les plus:
+ la finition exceptionnelle du cadran
+ les reflets de lumière qu'il crée et l'animation qu'il apporte
+ l'ingéniosité du mouvement et de l'affichage
+ la présentation du mouvement et sa finition
+ le positionnement de la montre sur le poignet malgré les 41mm de diamètre
les moins:
- la réserve de marche, plutôt courte
- la présence de la trotteuse dans le contexte de ce cadran nacré me semble superflue