C'est une jolie surprise que nous propose Girard-Perregaux en ce début d'année avec une nouvelle interprétation du Chronographe 1966 réalisée dans le cadre d'une série limitée de 10 montres en or rose et de 10 en or gris pour Dubail, le célèbre détaillant parisien.
L'intérêt du Chronographe 1966 "Doctor's Watch" réside dans le design du cadran qui apporte une dimension différente. Certes, il conserve la même organisation que précédemment. A la périphérie, une échelle. En position intermédiaire, la graduation des secondes du chronographe. Puis les deux sous-cadrans. Mais la fonction de l'échelle n'est plus la même et certains détails esthétiques ont été revus profondément.
La "Doctor's Watch" tire son nom des montres utilisées par les médecins pour mesurer le rythme cardiaque des patients grâce à l'échelle pulsométrique. Il suffit de prendre le pouls, d'enclencher le chronographe et de compter le nombre de pulsations de référence indiqué sur le cadran (ici: 30). A la trentième pulsation, le chronographe est stoppé et l'aiguille indique en lecture directe le rythme cardiaque. Evidemment, un chronographe n'est pas obligatoire (une montre à trotteuse centrale peut être utilisée de la même façon) mais il rend le processus beaucoup plus aisé et la lecture plus précise. Girard-Perregaux possède une longue tradition en montres de ce type puisque la Manufacture présenta ses premières "Doctor's Watch" dans les années 30. La série limitée pour Dubail est inspirée d'un de ces modèles du passé et c'est la raison pour laquelle s'en dégage une atmosphère délicieusement néo-rétro.
Plusieurs éléments contribuent à définir ce style particulier. Le premier élément est évidemment la police de caractère des chiffres. Ces derniers remplacent les index appliqués du Chronographe 1966. En effet, seuls les 12 et 6 sont présents dans la version traditionnelle à 40mm de diamètre. Le cadran apparaît donc comme plus plat et dans un premier temps, j'ai regretté cette perte de sensation de volume.
Le deuxième élément est la couleur de la graduation des secondes du chronographe. Ce cercle rouge intérieur joue un rôle important car il sépare de façon nette les fonctions habituelles du chronographe de l'échelle pulsométrique. Il diminue la taille perçue du cadran et en un sens le rend plus harmonieux. En effet, il casse l'impression de léger déséquilibre dû à la proximité des sous-cadrans du centre de la montre en raison du diamètre propre du module du chronographe. Je considère ce cercle comme très original dans notre contexte d'aujourd'hui et il contribue fortement à la réussite du cadran dans son ensemble.
Le troisième élément est la trotteuse du chronographe rouge. Elle est évidemment en harmonie avec la graduation et elle apporte une petite touche sportive au chronographe.
Le quatrième élément est la façon dont le nom de la marque est écrit sur le cadran. Il devient plus visible car présent sur deux lignes tout en étant plus large. C'est moins discret que sur le Chronographe 1966 d'origine mais la taille des caractères est cohérente avec celle de la référence de l'échelle pulsométrique.
Enfin, le cinquième et dernier élément est bien entendu l'échelle pulsométrique. J'apprécie fortement que l'indication de la référence soit écrite en français. L'utilisation de notre langue est certes due en partie aux contextes Dubail et "vintage" de la série limitée mais il est très agréable de voir que Girard-Perregaux a su résister à la tentation de l'anglais.
Il est étonnant de remarquer à quel point le changement de style de cadran transforme le Chronographe 1966. A la base, grâce à ses chiffres et index appliqués, à sa sobriété, le chronographe 1966 est une montre discrète et raffinée qui incarne la complication avec beaucoup d'élégance. Le Chronographe 1966 "Doctor's Watch" est plus audacieux, moins formel comme le prouvent ses couleurs, la taille des chiffres. Il secoue la quiétude du modèle initial en lui donnant un style beaucoup plus énergique sans toutefois perdre son élégance. Fort heureusement, le Chronographe 1966 "Doctor's Watch" est basé sur la version 40mm du Chronographe 1966, celle qui me plaît le plus car plus équilibrée et sans date. Cela se ressent immédiatement au poignet: la montre se porte avec grand confort et les courbes habituelles du boîtier 1966 lui donnent beaucoup de charme. J'aime particulièrement la version en or rose car la couleur du boîtier se marie fort bien avec le rouge du cadran. La version en or blanc est moins chaleureuse mais tout aussi réussie en adoptant un style plus sportif.
Le mouvement demeure le GP030C0 à architecture modulaire. Même si je regrette que Girard-Perregaux ne possède toujours pas à ce jour un mouvement chronographe intégré de manufacture, le GP030C0 remplit sa mission sans problème grâce notamment à l'efficacité du remontage du calibre de base et à la qualité du module à roue à colonne. En revanche, sa réserve de marche est plutôt courte (minimum de 36 heures) et évidemment, il est un peu frustrant esthétiquement parlant car le module est situé juste derrière le cadran: malgré le soin apporté à sa finition, le GP030C0 présente immanquablement l'aspect d'un mouvement à trois aiguilles. Son diamètre (23,9mm) reste petit pour le boîtier et j'aurais préféré un fond plein avec une jolie gravure à la place du fond saphir.
Malgré cette dernière remarque, le Chronographe 1966 "Doctor's Watch" m'a séduit par son esthétique réussie, par la cohérence entre le cadran et les courbes du boîtier et par le charme légèrement suranné qu'il dégage. Cette série limitée est pertinente car elle transforme le style initial du Chronographe 1966 tout en revisitant l'histoire de la Manufacture.
Merci à l'équipe de la boutique Dubail Place Vendôme pour son accueil.