La HM4 est décidément un objet horloger non identifié plein de paradoxes! C'est par exemple la Horological Machine au boîtier le plus original mais c'est en même temps, la seule qui affiche le temps de façon traditionnelle. Inspirée par les avions du milieu du siècle dernier, elle semble plus contemporaine que n'importe quelle montre. A la base évoluant dans une ambiance militaire, elle a su ne pas se prendre trop au sérieux jusqu'à se retrouver pilotée par un panda ou affublée de pin-ups sur la carlingue. Son histoire ne pouvait donc s'achever que sur un dernier clin d'oeil. Afin de rendre cette édition finale de 8 pièces la plus spectaculaire possible, Max Büsser et son équipe sont allés rechercher les codes d'un avion... furtif. C'est bien évidemment l'effet inverse de celui de la vocation première de l'engin volant qui est recherché car contrairement à un F-117 Nighthawk ou à un B-2 Spirit, la HM4 Final Edition n'a nullement l'objectif de disparaître non pas sous la couche des nuages mais sous la manche de la chemise.
J'ai déjà présenté en détails différentes versions de la HM4 comme la Thunderbolt en 2010, les Razzle Dazzle et Double Trouble en 2011 et la Thunderbolt RT en 2012. Je ne vais donc pas revenir sur les caractéristiques techniques de la HM4. En revanche, il est bon de rappeler que le point commun entre toutes les Horological Machine est leur capacité de transformation et cette HM4 Final Edition en est une nouvelle preuve.
A bien y regarder, quelques regards font la différence, toute la différence.
Le matériau et la couleur du boîtier d'abord: le traitement en PVD noir du boîtier en titane est spectaculaire car subtil et lumineux. Eh oui! La HM4 Final Edition est une montre lumineuse malgré son côté obscur. Grâce à cette couleur, ni gris anthracite, ni noir profond, le boîtier se pare de multiples reflets provoquées par la complexité de ses formes, ses nombreuses parties vitrées et par les alternances de types de finition. Rien de pire qu'une montre immense monocolore et monosaveur qui ressemblerait à un gros bloc sur le poignet. La HM4 est tout le contraire: imposante certes mais remplie de détails, de décrochages, de formes différentes et de dégradés de sa couleur dominante qui la rendent passionnante à observer sous toutes les coutures.
Le changement esthétique ensuite: il n'est finalement pas si significatif que cela si on raisonne en pourcentage de la surface concernée. Mais voilà: en transformant la forme des deux cadrans devenant des panneaux angulaires carrés, l'équipe de MB&F a métamorphosé la HM4.
Cette combinaison de couleurs sombres et d'angles droits et vifs donne une nouvelle dimension à la HM4: d'avion militaire, elle devient engin volant guerrier et menaçant. J'aurais ainsi beaucoup de mal à retrouver le Panda sur cette Final Edition: sa présence serait alors totalement hors de propos! C'est dire à quel point l'esprit de la HM4 n'est plus le même. J'ai presque envie de dire que c'est un Max Büsser adulte qui est derrière cette montre alors que c'était plus l'enfant qui se cachait derrière la Thunderbolt initiale.
Je dois avouer qu'elle ne me fait pas uniquement penser à un avion furtif. Avec ces deux carrés aux extrémités des cônes, elle m'évoque aussi les premiers appareils photos, de véritables chambres noires.
Le noir a d'autres vertus: il met d'abord en valeur les éléments qui conservent leurs couleurs d'origine comme le mouvement dont les détails se détachent de façon spectaculaire, particulièrement lorsque la HM4 Final Edition est retournée. Il réduit ensuite la perception de la taille ce qui dans le contexte particulier de cette Horological Machine n'est pas un mauvais point.
La HM4 Final Edition conserve tous les atouts de ses devancières à savoir un excellent maintien au poignet grâce à la boucle déployante qui est un vrai bonheur à manipuler, un mouvement agréable à utiliser au quotidien grâce à ses deux couronnes et à ses 3 jours de réserve de marche, une lecture de l'heure aisée malgré la taille du cadran et l'étrangeté de ses formes qui provoque de fortes émotions. En revanche, comme toujours, les amateurs de discrétion l'oublieront sur le champ car sa hauteur et son gabarit empêchent tout passage sous la chemise. Et comme la HM4 se remarque instantanément, aucune fuite n'est possible!
Le feu d'artifice final de la HM4 est réussi et arrive à me convaincre car il projette la Machine dans un nouvel environnement. Si d'un côté, je regrette qu'elle perde une dose de dérision et d'humour, son côté agressif et sombre colle bien à l'esprit du boîtier. Cependant elle ne remplace pas dans mon coeur la Razzle Dazzle ou la Double Trouble qui sont pour moi les plus abouties de toutes les HM4 car combinant style, expression artistique et second degré. Un second degré qui manque tout de même un peu ici.