La collection Excalibur est sans aucun doute depuis de nombreuses années la plus représentative du style audacieux et baroque de Roger Dubuis. Les boîtiers au diamètre de 45mm qui se caractérisent par la lunette cannelée, les protèges-couronne et les 3 cornes sont les écrins parfaitement adaptés pour héberger les mouvements les plus extravagants et les plus techniquement aboutis de la Manufacture genevoise. Une montre Excalibur se reconnaît au premier coup d'oeil, associant puissance et raffinement dans un contexte frôlant l'exubérance.
Si certains clients restent attirés par la beauté des mécanismes de la collection, il n'en demeure pas moins que ces derniers temps le marché a évolué. Le climat général lié à la crise, s'il n'a pas freiné les ventes du segment de la haute horlogerie, a cependant conduit à un retour de la demande vers des pièces plus classiques et moins ostentatoires. Parallèlement, le centre de gravité du marché s'est déplacé vers la Chine. Or la clientèle chinoise recherche des montres aux diamètres plus contenus, mieux adaptés à ses poignets que les boîtiers aux hormones des années 2000.
Fort de ce constat et s'inscrivant dans la refonte de son catalogue, Roger Dubuis a crée un certain événement lors du SIHH 2012 en présentant une version 42mm de l'Excalibur. Pour être franc, je fus personnellement très surpris par ce choix car dans ma tête, c'était la collection Monégasque, dévoilée l'année précédente, qui avait pour but de représenter l'offre classique et d'entrée de gamme de Roger Dubuis par le biais des modèles acier, la collection Excalibur restant dans la dimension plus exclusive que ce soit en termes de design que de mouvement. J'avais tort car l'Excalibur 42mm Automatique joue sur plusieurs tableaux à la fois, n'hésitant pas à marcher sur les plates-bandes de la Monégasque tout en conservant certaines caractéristiques propres aux Excalibur.
L'Excalibur 42mm Automatique existe en 4 versions: or rose ou acier, cadran satiné soleil sur fond gris ou argent. Elle ne renie nullement ses origines puisque le boîtier peut être considéré comme une version sage du traditionnel boîtier Excalibur. Comme le nom de la montre l'indique, il perd 3mm ce qui constitue une différence notable. La lunette cannelée est moins marquée et les protèges-couronne ont disparu. En revanche, les 3 cornes demeurent très présentes et constituent le lien le plus évident avec l'Excalibur 45mm. Les designers ont réalisé un excellent travail sur ce boîtier car ils ont obtenu une sorte d'équilibre entre l'inspiration de l'Excalibur d'origine et la recherche d'un classicisme et d'une fluidité des lignes. Il est élégant tout en possédant une petite touche d'originalité.
Le cadran est lui aussi fidèle à la collection avec ses chiffres romains allongés qui occupent une très grande partie de la surface. Comme toujours, le XII est plus ramassé afin de laisser l'inscription du nom de la marque. Si je compare ce cadran avec celui de l'Excalibur 45mm Automatique, je peux observer également des changements. Le rehaut devient extrêmement discret, en très légère surélévation par rapport à la partie principale du cadran. Les chiffres du sous-cadran de la trotteuse ont été retirés afin d'épurer au maximum le design. La forme des aiguilles est identique et renforce l'identité de la montre.
L'Excalibur 42mm Automatique possède un autre point commun avec sa grande soeur et malheureusement c'est un détail que j'apprécie moins. Il s'agit de la position du sous-cadran bien trop proche du centre de la montre. Les bases des aiguilles "mordent" d'ailleurs dessus. Certes, dans le contexte d'une montre 3 aiguilles, c'est moins grave qu'avec un chronographe et ce d'autant plus que le sous-cadran est à 9 heures. Mais je trouve que la montre aurait gagné en équilibre avec un sous-cadran mieux positionné. La recette miracle n'existe pas si ce n'est celle qui consiste à réduire la taille du boîtier. C'est le mouvement qui commande ce positionnement et avec un boîtier de 42mm, l'écueil ne pouvait être évité.
Justement, il est temps de parler du mouvement car il constitue la pierre angulaire de la stratégie de Roger Dubuis autour des Excalibur 42mm. Afin de maîtriser le prix de vente, notamment celui de la version acier, Roger Dubuis a équipé cette montre d'un mouvement aux coûts de fabrication inférieurs à ceux du RD77. Cela ne veut pas dire que le RD620 est un mouvement au rabais bien au contraire. Son architecture est aussi appréciable avec son micro-rotor et la jolie forme des ponts. Seule la présentation de l'organe régulant est en retrait selon moi par rapport au RD77. Son épaisseur est légèrement supérieure (4,5mm vs 4mm). La bonne nouvelle est que les performances sont aussi bonnes (fréquence de 4hz) pour ne pas dire meilleures sous certains aspects (une réserve de marche de 52 heures contre 42 heures pour le RD77). La qualité de fabrication demeure comme le certifie le poinçon de Genève. La finition est discrète, sobre et sans reproche. J'aurais cependant aimé un micro-rotor avec une présentation plus avantageuse, la concentration des inscriptions sur la masse oscillante ne le valorisant pas.
Un des grands atouts de l'Excalibur 42mm est son confort. Les cornes sont courbées et épousent parfaitement le poignet. C'est au porté que le cadran satiné soleil s'apprécie le plus car il capte facilement la lumière et crée de beaux reflets dans sa version fond argent. La version fond gris est plus subtile, plus discrète. Les chiffres se fondent alors plus dans le cadran jusqu'à presque s'estomper. Le choix entre les deux couleurs de cadran est important car esthétiquement, elles provoquent des perceptions très différentes. J'ai ici une préférence pour le cadran fond argent, plus dynamique et qui fait plus ressortir le dessin des chiffres romains.
Avec l'Excalibur 42mm Automatique, Roger Dubuis a souhaité présenter une montre 3 aiguilles au tarif ajusté tout en conservant les principaux attraits de la marque: un mouvement automatique à micro-rotor, un boîtier possédant un soupçon d'originalité, un cadran aux chiffres caractéristiques. Malgré quelques défauts comme la position du sous-cadran, le bilan de cette Excalibur 42mm Automatique est très positif car le contenu horloger demeure solide pour un prix très attractif dans la version acier, autour de 13.000 euros, le tout accompagné du Poinçon de Genève et du COSC! Avec la Monégasque Acier, elle constitue donc le moyen le plus économique de rentrer dans l'univers de Roger Dubuis. A ce titre, elle s'adresse aux amateurs à la recherche d'une montre de haute horlogerie au tarif contenu et qui souhaitent éviter de tomber dans le classicisme absolu. Je ne peux que saluer la démarche de Roger Dubuis qui propose dans son catalogue deux montres différentes d'entrée de gamme en acier respectant les critères de qualité de la Manufacture.
Merci à l'équipe Roger Dubuis pour son accueil pendant le SIHH 2012.