Urwerk: UR-220 "The Falcon Project"

La montre Urwerk que je préfère est l'UR-202 qui se distingue par sa réinterprétation du principe de l'heure vagabonde grâce à ses aiguilles des minutes télescopiques. Le temps se déroule de façon continue, le carrousel central effectuant une révolution constante et permanente. J'aime aussi beaucoup l'UR-210 même si cette dernière présente un concept différent: celui de la grande aiguille rétrograde. A la base les deux montres partagent le même carrousel central qui transporte trois satellites comportant chacun un cube rotatif. Les cubes ont un double mouvement. Ils se déplacent autour du carrousel mais effectuent également une rotation sur eux-mêmes afin que la bonne face du plot se positionnant au début de la graduation des minutes corresponde à l'heure en cours.


Il s'agit de mouvements paisibles et lents, par forcément perceptibles à l'oeil nu. Pour bien comprendre cette double animation, il suffit de tirer la couronne et d'accélérer l'écoulement du temps. Comme par magie, le carrousel et les cubes entament alors un superbe ballet. 

En revanche, l'UR-210 n'utilise plus les aiguilles télescopiques de l'UR-202 qui faisaient partie intégrante des satellites soutenant les cubes. Elles sont remplacées par une aiguille unique, majestueuse qui va accompagner le cube tout le long de la graduation des minutes. A la 60ième minute, l'aiguille se sépare du cube, effectue un mouvement rétrograde instantané et accueille au début de la graduation le cube suivant. Le comportement de cette aiguille explique la raison pour laquelle j'aime beaucoup l'UR-210. D'une certaine façon, elle me rappelle la célèbre Opus V de Harry Winston qui est pour moi, la plus belle des Opus. 

Urwerk présenta l'UR-220 à la fin de l'été 2020. Un examen rapide de la montre pourrait laisser penser qu'il s'agit d'une simple mise à jour de l'UR-210. Ce n'est pas totalement inexact puisque les deux montres ont exactement le même système d'affichage à cubes rotatifs et à grande aiguille rétrograde. En revanche, c'est tout ce qu'il y a autour qui change. En fait l'UR-220 est une montre plus importante qu'elle ne semble l'être car elle permet à Urwerk d'explorer deux principaux concepts.

L'affichage de la réserve de marche utilise deux indicateurs:


Celui du confort au porter pour commencer. Il s'agit évidemment d'une évolution fondamentale. Elle se manifeste à travers 3 composantes:
  • la taille du boîtier: ce dernier est légèrement plus petit (ses dimensions sont de 43,8mm x 52,9mm alors que celles du boîtier de l'UR-210 sont de 43,8mm x 53,6mm) mais surtout il est beaucoup plus fin (14,8mm vs 17,8mm). Compte tenu des gabarits des montres, chaque millimètre en plus ou en moins est immédiatement perceptible. L'UR-220 apparaît ainsi comme plus élancée, plus fluide. Mais attention cependant: elle reste une montre imposante,
  • le matériau principal du boîtier est en carbone (la base du boîtier restant en titane) ce qui l'allège tout en ayant un intérêt esthétique,
  • et un tout nouveau bracelet caoutchouc spécifiquement développé par Urwerk. Ce bracelet est texturé et moulé sous vulcanisation Vulcarboné et fini à la main. Sa souplesse, la sensation qu'il procure au contact de la peau, son intégration esthétique le rendent très agréable. Il constitue un vrai plus.
Vous noterez l'affichage de la durée de fonctionnement du mouvement à l'arrière de la montre:


L'autre concept qui est mobilisé à travers l'UR-220 est cher à Felix Baumgartner: il s'agit de l'interactivité entre la machine et l'homme, entre la montre et son propriétaire. Tout d'abord le mouvement de base est à remontage manuel (ce qui explique aussi la diminution de l'épaisseur du boîtier): Urwerk a conservé le mouvement Elite de Zenith qui anime l'UR-210 et a retiré le mécanisme de remontage automatique. La réserve de marche du mouvement est de 48 heures dans le contexte de l'UR-220, en diminution par rapport aux performances traditionnelles du calibre compte tenu de l'énergie requise à faire fonctionner le module d'affichage. Le changement du type de remontage a plusieurs conséquences. Les affichages sont modifiés de chaque côté. Côté face, l'affichage de la réserve de marche et celui de l'efficacité du remontage sont remplacés par un double-affichage de la réserve de marche. A l'arrière de la montre, le fameux sélecteur de l'efficacité du remontage qui influence le comportement des turbines reliées à la masse oscillante est remplacé par une jauge numérique. Elle indique la durée de fonctionnement du mécanisme exprimée en mois grâce à deux rouleaux adjacents. La révision de la montre est conseillée à l'issue du 39ième mois de fonctionnement. Une fois la montre révisée, la jauge est remise à zéro. Nous retrouvons ainsi le fameux témoin Oil Change de l'UR-110 sous une forme plus élaborée.


L'UR-220 est selon moi une belle réalisation de la part d'Urwerk. Elle respecte tous les critères de qualité et de rigueur dans l'exécution propres à la marque. Elle n'est pas révolutionnaire par rapport à l'UR-210 mais ses évolutions sont pertinentes et la rendent plus agréable à porter au quotidien. Le choix entre l'UR-210 et l'UR-220 se situe surtout à ce niveau. Pour ce qui est des complications additionnelles, c'est une question d'appréciation. L'affichage de la durée de fonctionnement est surtout intéressante par son interprétation à double rouleau et la possibilité de contrôler l'efficacité du remontage avait du sens sur l'UR-210. J'aurais ainsi du mal à dire qu'une montre est supérieure à l'autre. En revanche, l'épaisseur réduite du boîtier et le confort du nouveau bracelet caoutchouc sont des avantages incontestables. 

L'UR-220 "The Falcon Project" (qui depuis peu a été rejointe par une version All Black) est disponible à un prix de 162.000 euros TTC.

Les plus:
- la magie du comportement de l'aiguille principale
- un boîtier affiné
- le bracelet très confortable et parfaitement intégré du point de vue esthétique

Les moins:
- les performances du mouvement de base commencent à dater