Patek Philippe: 5230

La montre à heures universelles fait partie des spécialités de Patek Philippe. Même si elle fut absente du catalogue pendant plusieurs décennies jusqu'à son retour avec la 5110, elle a toujours contribué à la renommée de la Manufacture. Il faut dire qu'il y a un style unique et une grande maîtrise de la part de Patek Philippe dans le traitement de cette complication basée sur les principes définis par Louis Cottier.

Ce qu'a compris Patek Philippe, c'est qu'une montre à heures universelles doit demeurer lisible et pratique. C'est la raison pour laquelle, la 5110, la 5130 ou la toute nouvelle 5230 qui fut présentée à Baselworld 2016 partagent en commun cette quête de l'essentiel: elles ne gèrent que 24 fuseaux (ceux à heures "pleines"), n'ont ni trotteuse ni guichet de date. Alors, certes, on peut regretter que le mouvement qui équipe la 5230 n'ait pas évolué et que la montre ne gère pas les fuseaux décalés, excluant de fait des pays significatifs comme l'Inde ou l'Iran du champ d'application de la montre. Mais d'un autre côté, la simplicité devient un atout incontestable pour ce type de complication. Le disque des villes (qui intègre les derniers changements "géopolitiques" intervenus ces dernières années)  est lisible, aéré et le fuseau de référence, à midi, est immédiatement détecté. La lecture des heures des 23 autres fuseaux est relativement aisée et le changement de fuseau de référence s'effectue simplement grâce au poussoir à 10 heures. C'est bien cette simplicité et cette élégance dans l'exécution qui expliquent pourquoi je suis un heureux propriétaire d'une 5130. La complication fait voyager dans sa tête et ce, même si on n'a pas besoin de connaître l'heure à Mexico ou Karachi.


Jusqu'à la sortie de la 5230, les amateurs de montres à heures universelles se partageaient en deux catégories: ceux qui considéraient que la 5110 était la plus belle réinterprétation de la complication, grâce à son diamètre contenu (37mm) et la beauté du guillochage central et ceux qui pensaient que la 5130 méritait cette distinction grâce à sa taille plus contemporaine (39mm) et ses aiguilles ciseaux.

En examinant de près la 5230, j'ai l'impression qu'elle peut mettre tout le monde d'accord. En effet, elle rassemble les points forts de la 5110 et de la 5130... tout en dégageant sa propre identité. Cette identité est basée avant tout sur le boîtier qui tranche significativement avec ceux des 5110 et 5130. Si le diamètre de la montre est légèrement inférieur à celui de la 5130 (38,5mm vs 39mm), la 5230 possède en revanche une présence au poignet plus forte due aux cornes en forme d'ailes  et à leur rendu plus géométrique. La lunette polie, plus fine, augmente l'ouverture du cadran et par la même occasion, la taille perçue. J'aime beaucoup ce boîtier, à l'inspiration très classique qui se marie idéalement avec la complication historique des heures universelles. D'ailleurs, Patek Philippe a renforcé cette dimension "néo-rétro" en utilisant une police de caractère fine, élégante et légèrement surannée pour l'inscription des villes de référence sur le disque des fuseaux.


Mais la grande force de la 5230, par rapport à ses deux devancières est la très belle combinaison entre les deux aiguilles et le guillochage de la zone centrale du cadran. Cette combinaison n'est pas uniquement une réussite esthétique. La 5230, aujourd'hui disponible en or gris et en or rose, offre un contraste chromatique important entre cette zone centrale et les aiguilles (ainsi qu'avec les disques des heures et des villes) ce qui n'était pas le cas dans les versions en or des 5110 et 5130. La lisibilité est ainsi grandement améliorée, notamment par rapport à la 5130 dont ce n'était pas le point fort. Il s'agit d'un point important à souligner et qui explique en grande partie pourquoi la 5230 me plaît autant.


Les formes des aiguilles et les motifs du guillochage répondent également à mes attentes. Les aiguilles sont magnifiques, particulièrement celle des heures dont la forme est inspirée par la constellation de la Croix du Sud. Même si elle est évidée, elle est plus facilement perceptible que l'aiguille ciseaux de la 5130. L'aiguille losange  des minutes tranche significativement avec celle des heures, ce qui est un excellent point puisqu'elles ont quasiment la même longueur.

Les motifs du guillochage central, de type "panier" sont subtils et élégants. Il témoigne de la préservation de la tradition horlogère au sein de la manufacture car réalisé grâce à un tour à flinquer quasi centenaire. La préservation du savoir-faire passe aussi par celle de l'outillage!


Le mouvement qui équipe la 5230 est, sans surprise, le calibre 240 HU qui reprend une nouvelle fois du service. Sa présentation est agréable, mise en valeur par le micro-rotor. Les finitions sont excellentes mais sans difficulté particulière puisque la forme des ponts évite les angles rentrants. Sa fréquence est de 3hz et sa réserve de marche se situe autour des deux jours. J'apprécie beaucoup ce mouvement à l'usage, étant fiable, précis avec une efficacité au remontage excellente pour un micro-rotor. En revanche, je trouve le poussoir du changement du fuseau de référence toujours un peu dur... surtout quand en rentrant de Londres, il faut appuyer 23 fois pour se recaler sur Paris!

Mais, à moins d'être en permanence en voyage, il n'est pas nécessaire de changer fréquemment le fuseau de référence! La grande force d'une montre à heures universelles est la lecture directe des heures des 24 fuseaux et la 5230, grâce à son parfait équilibre, sa présentation efficace et raffinée, simplifie grandement cette tâche. Pratique et séduisante, magnifiée par la  beauté de ses aiguilles et de son guillochage central, dégageant une belle présence au poignet grâce à son boîtier, la 5230 est selon moi, la plus réussie du trio 5110-5130-5230. Patek Philippe réaffirme donc sa maîtrise, et j'ai envie de dire, sa suprématie dans l'exécution de cette complication à travers cette montre aboutie.


Merci à l'équipe Patek Philippe pour son accueil lors de Baselworld 2016.

Les plus:
+ le caractère du boîtier
+ la beauté des aiguilles et du guillochage central
+ la fiabilité et l'efficacité du mouvement 240 HU
+ la simplicité du fonctionnement et la lisibilité des informations

Les moins:
- le poussoir est toujours un peu dur
- le calibre 240 HU ne gère toujours pas les fuseaux décalés mais la limitation à 24 fuseaux contribue à la lisibilité