Sarpaneva: Korona K0

Après deux années d'améliorations, de modifications, Stepan Sarpaneva a dévoilé la version finale de la K0 lors de la Foire de Bâle 2012. Je me souviens très bien du prototype initial et le moins que je puisse dire est que l'attente valait le coup. En effet, les 3 déclinaisons de la K0 sont à la fois beaucoup plus équilibrées, plus présentes... bref plus convaincantes que la toute première approche proposée par Stepan.

Il faut dire que l'exercice n'était pas simple. Pour plein de raisons, la création de la K0 était risquée: il s'agissait de définir une montre à 3 aiguilles (et donc sans l'affichage des phases de lune si intimement lié à la démarche de Stepan) dont la vocation "sportive - de plongée" était éloignée de celles des Korona qui ont précédé.

La mission est accomplie car Stepan a réussi à faire cohabiter son style avec le côté pratique de la montre, la K0 étant étanche à 300 mètres. Ce n'est pas parce que la montre émane d'un horloger indépendant et qu'elle comporte un certain nombre d'originalités que sa fonctionnalité doit être mise de côté.

Et c'est justement dans ce domaine précis où sa patte d'horloger de talent s'est exprimée: il a retravaillé le mouvement et adapté le boîtier afin que tous les réglages (mise à l'heure et déplacement de la lunette interne) se fassent intégralement à la couronne. La K0 est donc une montre simple à utiliser, sans devoir manipuler une deuxième couronne qui risquait de casser la fluidité du design.

Car la K0 est une réussite esthétique. Ce n'est certes pas ma Korona favorite préférant le charme mystérieux et envoutant des K3 par exemple. Mais nous y retrouvons bien les détails qui permettent de définir la touche si personnelle de Stepan.

Le boîtier de 46mm possède la forme typique des Korona. Cette taille peut sembler impressionnante mais la montre fait plus petite qu'elle n'est au poignet: les cornes sont très courtes et très incurvées, s'estompant une fois la montre portée. L'ouverture du cadran est limitée compte tenu de la forme du boîtier et de la présence de la lunette interne. De plus la taille des index a été revue, tout comme celle des aiguilles si bien que le cadran semble plus petit. L'épaisseur de 11,32mm reste relativement contenue et ne choque point (à noter l'épaisseur de 2,5mm du verre).

Autre élément incontournable: le rendu "grillagé". Il aurait pu alourdir visuellement le cadran dans ce contexte précis de montre à vocation sportive mais il s'intègre bien grâce au jeu de couleurs. De plus, le cadran reste très épuré grâce au retrait des chiffres des minutes qui étaient utilisés sur le prototype initial.

Les index et les aiguilles apportent une lisibilité maximum tout comme le bout élargi de la trotteuse. Le traitement anti-reflets du verre est efficace. La lunette interne se règle donc à la couronne et du fait du "Sarpaneva" indiqué sur cette lunette, je me suis amusé à la faire tourner afin que ce nom se retrouve à différents endroits sur le cadran: cela modifie l'esthétique de la montre et selon l'humeur, nous pouvons le placer sur le côté, ou à douze heures etc...

La couronne est maintenant positionnée à 4 heures profitant du renforcement du boîtier: un choix plus qu'heureux car sa position sur le prototype initial à 3 heures était moins convaincante.

Le mouvement reste le fidèle Soprod A10 que Stepan maîtrise totalement. Il n'y a pas de surprise à attendre à ce niveau: le mouvement est certes pas exclusif mais fiable et sans souci. Stepan l'a évidemment retravaillé pour intégrer la lunette interne ainsi que son système de réglage via la couronne. En termes de performances, il propose comme d'habitude une fréquence de 4hz et une réserve de marche de 42 heures.

3 déclinaisons de la K0 sont disponibles, l'une à boîtier acier, les deux autres à boîtier acier avec un revêtement DLC noir. La version acier propose un cadran avec des tons gris et bleus. Il s'agit de la version la plus lumineuse, sûrement la plus facile à porter. Les versions DLC sont plus radicales: soit le bleu devient plus présent sur le cadran, soit le gris l'emporte. C'est bien cette dernière qui constitue ma K0 préférée car j'y retrouve l'ambiance mystérieuse et mélancolique propre à Stepan.

En retournant les montres, nous découvrons son côté malicieux: plutôt que de vouloir numéroter de façon presque artificielle sa production, il rappelle avec le "One of the Few" qu'il n'y aura pas pléthore de K0 de disponibles. Et j'interprète le "Ruler of Water" comme un clin d'oeil ironique vers tous ceux qui affublent leurs montres (et particulièrement de plongée) de superlatifs frisant le ridicule.

J'ai donc été séduit par cette K0 finale, bien plus en tout cas que la version initiale. Même si ce n'est pas vers cette Korona que je dirigerais, je trouve que la qualité de l'exécution et l'intégration réussie du style de Stepan Sarpaneva dans ce contexte plus fonctionnel lui confèrent certains atouts.

Un grand merci à Stepan Sarpaneva pour son accueil pendant la Foire de Bâle.